Rebienvenue à la Préfète-en-Chef !

[ -HJ- Le titre du topic est contradictoire avec ce qui m'attend ]

Olyssa Nymfalis était épuisée. Il fallait avouer que les deux derniers jours ne lui avaient pas laissé de répit. Les professeurs exigeaient tout d’abord d’elle qu’elle rattrape tous ses cours depuis le début de l’année, y compris des devoirs supplémentaires pour évaluer son niveau. Ils lui avaient bien répété en l’espace de quarante-huit heures qu’elle devrait passer ses BUSES à la fin de l’année, tant et si bien qu’elle en avait eu mal au crâne, et avait failli se prendre une retenue lorsqu’elle avait coupé le professeur de sortilèges d’un air exaspéré pour terminer sa phrase de présentation sur l’examen. Elle devait donc fournir un travail personnel assez important, ce qui ne faisait pas partie de ses habitudes. La fainéantise de la jeune fille n’était en effet pas une nouveauté. Après le dîner, elle aimait s’asseoir en tailleur dans son fauteuil favori de la tour des lions, au bord du feu, dévorer des livres jusque tard dans la nuit, et ses nouvelles attributions contredisaient fortement cette vieille tradition.

Mis à part sa montagne de devoirs et d’études, elle avait récupéré son poste de Poursuiveuse au sein de l’ Equipe de Quidditch des Rouge et Or après un simple test du capitaine de l’équipe. Olyssa n’avait en rien perdu ses réflexes, pratiquant régulièrement sur le terrain de vol disponible à Beauxbâtons. Elle s’était donc vue réintégrer dans l’équipe avec joie, et s’était précipitée à l’entraînement du jour prévu à six heures du soir. Vent et incessante pluie glacée étaient au rendez-vous, et la jeune fille considéra avec satisfaction qu' étant donné les cirsconstances, elle s’en était bien sortie. La sensation d’ adrénaline que tout joueur passionné ressent en volant passée, ce fut fatigue, froid et abattement qui saisirent son esprit. Ses relations sociales n’étaient plus ce qu’elles étaient, elle n’avait plus aucun repère à Poudlard et il lui restait une dissertation de Botanique sur l’Aconit – ou Tue-Loup – à rédiger.

Au moins deux centimères d’eau dans les chaussures, ses longs cheveux goûtant désagréablement sur sa robe de Quidditch détrempée, la douche chaude et apaisante qu’elle prévoyait à son retour dans la Tour des Gryffondors fut compromise par un courrier l’attendant sur son lit à baldaquins. Intriguée, Olyssa décacheta l’enveloppe au sceau de Poudlard et en parcouru rapidement les quelques lignes qui lui était adressées par le directeur…

« Nom d’un strangulot desséché ! – elle se demanda un instant avec perplexité d’où elle sortait cette injure – Jvais te la faire bouffer ta réunion avec le Préfet-en-Chef de Serpentard espèce d’abruti de directeur dégarni ! » menaça Oly à voix haute en traversant la Salle Commune, sous les regards des Gryffondors partagés entre l’amusement et la prudence. Personne ne semblait par contre avoir oublié qu’ Oly pouvait être d’humeur parfois très nosive. « Dégage ! » Cracha-t-elle à un jeune Gryffondor qui n’avait pas eu le temps de faire connaissance avec sa Préfète-en-Chef et lui courait après pour lui demander comment s’était passé l’entraînement de Quidditch.
« Apparemment mal » conclut un sixième année amusée par la situation, le petit Gryffondor s’étant rassit d’un air choqué dans un fauteuil comme s’il venait de se prendre une gifle.

Olyssa Nymfalis parcourait à présent les couloirs du château, jurant intérieurement. *Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?!* Outre le fait qu’elle avait l’estomac vide, qu’elle avait froid, une tonne de travail à accomplir, des problèmes multiples et une réunion sur le dos, son humeur massacrante pouvait surtout être attribuée à un fait particulier : * Manquait plus que ça ! Face à face avec Adams !* Olyssa avait déjà eu le droit aux cris de Kalinah à propos de sa manière de tirer un trait sur son passé, sans avoir donné de nouvelles durant son année à Beauxbâtons. Elle n'avait pas besoin d’avoir les commentaires de Mathias Adams en plus. Le connaissant, ils seraient sûrement basés sur la provocation et le dégoût, ce qui promettait de blesser profondément la Gryffondor, comme dès que cela venait du Serpentard de toute manière. L’appréhension était donc l’une des raisons principales de l’attitude d’Oly...Or, un autre sentiment venait s’ajouter à celui-ci : Elle était furieuse, jalouse au possible. Le Bal d’Halloween lui avait offert une information précieuse la veille, mis à part celle notoire que les élèves des quatre maisons étaient toujours aussi bagarreurs entre eux…Adams sortait avec Holmes ! Il n’y avait pas de doute…Sinon pourquoi la Serdaigle se serait permise de lui caresser la joue ? Pourquoi le Serpentard l’aurait-il laissée faire en lui adressant un sourire des plus équivoques ?

A sa surprise, la jeune Nymfalis avait vu resurgir brusquement ses vieux sentiments à l’égard du Serpentard dès qu’elle l’avait vu. Et maintenant, ces sentiments la torturaient et semblaient se faire un devoir de lui percer le cœur telles des lames aiguisées. Elle avait pourtant réussi à tirer un trait sur le Préfet-en-Chef dès sa troisième année…Pourquoi fallait-il que cela réapparaisse maintenant, dans les pires circonstances qu’il puisse exister ? Beaucoup trop de « pourquoi » trottaient décidément dans la tête de la Gryffondor, qui avait quand même fini par s’expliquer sa réunion avec le jeune Adams comme la réattribution de son statut de Préfète-en-Chef. Hines ne lui avait pas précisé le motif de cette réunion, mais le fait qu’elle se déroule dans la Salle des Préfets et en la compagnie d’ Adams était suffisant. Bizarrement, le retour de ses pouvoirs de Préfète-en-Chef ne lui procurait aucune satisfaction. Cela signifiait que sa coopération avec Mathias devrait recommencer, et si celui-ci lui en voulait autant qu’elle lui en voulait, cela promettait d’être explosif. Seulement, Olyssa ne pourrait jamais lui avouer pourquoi elle était en colère contre lui…Et c’était d’autant plus dur pour elle.

« Vie de m**** » grogna Oly en s’appuyant sur la porte de la Salle des Préfets. Elle avait toujours été difficile à ouvrir, si bien que lorsque la porte en question bougea sans problèmes, la jeune fille fut si surprise qu’elle ne dut qu’à ses réflexes de ne pas être emportée par son élan. * Et encore un truc qui a changé ! Sublime entrée…Fait ch*** !!*
Elle passa la main dans ses cheveux collés par la pluie d’un air rageux et osa enfin poser ses yeux sur Mathias Adams, assit dans un fauteuil et l’observant sans gêne. Elle ne s’était jamais trouvée aussi près de lui depuis un an et demi. Elle n’avait jamais vu le noir ténébreux de ses yeux de manière aussi distincte depuis ce temps-là. Et les battements de son cœur n’avaient jamais retenti avec autant de force depuis bien longtemps.

« Bonsoir Mathias » dit-elle simplement en fixant ses yeux dans ceux du Serpentard. Après tout, son regard rempli de la légendaire détermination gryffondorienne lui permettait de cacher bien des sentiments…

[J’aime brouiller les pistes. ]

L’arrivée de la Préfete-en-Chef dans la salle des Préfets fut pour le moins... difficile à manquer. En fait, l’adolescente réussi de peu, dans un réflexe pas vraiment gracieux, à éviter de s’étaler par terre. Néanmoins, ce ne fut pas tant l’attitude maladroite de la Gryffondor que son allure générale qui surpris Mathias. Olyssa, vêtue de son uniforme de Quidditch, semblait venir de prendre une douche toute habillée. Ses longs cheveux couleur miel étaient gorgés d’eau, les rendant lourds et emmêlés, et sa robe gouttait abondamment sur le sol. De plus, au son que faisaient ses souliers, il était évident qu’ils devaient s’être transformés en petits aquariums mobiles... Réflexion faite, ça ressemblait davantage au résultat d’une baignade qu’à celui d’une douche.

Lorsqu’elle s’adressa à lui, le Serpentard n’eut d’autre choix que de relever le yeux pour lui rendre son regard. Il n’avait pas envie de la regarder droit dans les yeux, mais il désirait encore moins être celui des deux qui aurait la faiblesse de rompre le contact visuel. Alors il s’efforça d’ignorer l’étau qui comprimait son coeur à la vue des deux iris aux couleurs du pacifique, se répétant qu’il n’avait aucun, mais vraiment AUCUN motif pour ressentir un truc du genre. Olyssa n’était qu’une fille, hypocrite de surcroît. Il n’y avait vraiment pas de raison de se mettre dans cet état. Étrangement, l’image d’Odette Ribaldry vint à l’esprit du jeune Adams et il se demanda distraitement si la placide directrice des Serdaigles parvenait à garder son éternel air indifférent même dans ce genre de situation... Si elle le pouvait, lui aussi.

"Nymfalis." , lâcha le Préfet-en-Chef en guise de salutation, tentant d’être le plus neutre possible.

Il se leva ensuite, parce qu’il n’allait pas rester assis face à Olyssa. S’il pouvait la mettre mal à l’aise un peu, il n’allait pas cracher sur l’occasion... Ce n’était pas qu’il voulait se venger ou quelque chose du genre. C’était plutôt que, n’étant lui-même pas à son aise, il ne voulait pas laisser la Gryffondor en profiter. Il avait l’impression qu’il suffisait qu’elle lui fasse une remarque de travers pour qu’il explose. Et il n’en avait pas envie... Il était bien sans elle. Enfin, il avait réussi à s’y faire quoi. Pourquoi fallait-elle qu’elle revienne tourner le couteau dans la plaie ? Pourquoi d’ailleurs avait-elle réussi à lui infliger pareille blessure ? Ce n’était qu’une fille... Ce n’était qu’une fille. Ce n’était qu’une fille ! Par Merlin !

"J’espère que tu as toujours ton badge, le Directeur ne m’en a pas donné un nouveau à te remettre." , enchaîna Mathias, sur le même ton, en enfonçant les mains dans ses poches d’un air nonchalant. Il ne bougea cependant pas de l’endroit où il était parce que, franchement, il serait aller où ?

Et là, il y eut un silence. Forcément. Que devait-il dire au juste ? L’aider à s’intégrer... Il en avait des belles le directeur ! Elle n’avait pas eu de mal à partir, elle pouvait bien se débrouiller avec son retour, non ? Et puis, Julie aurait très bien pu se charger de lui rapporter les ragots du moment, dans le dortoir des filles de cinquième de Gryffondor. L’héritier Adams, lui, n’avait pas envie de parler de trucs stupides et barbants. Olyssa ne tenait probablement pas plus que ça à sa compagnie alors pourquoi les forçait-on à être bons copains ? Préfets-en-Chef devait-il forcément rimé avec entente et coopération ? Bref, ce fut Mathias qui rompit le silence, puisque c’était à lui qu’incombait cette tâche :

"Les Préfets sont toujours Norbert, Julie, Haypèn et O’Neill. Par contre, il y a eu des changement dans les profs, mais j’imagine que le directeur a dû t’en parler... En fait, je ne sais pas trop à quoi Hines s’attendait en nous demandant de nous rencontrer. Alors... T’as des questions ? Ou je peux retourner faire quelque chose de plus intéressant..."

Son coeur battait fort, résonnait dans toute sa poitrine, et il se demanda s’il n’allait pas finir par s’arrêter... ou exploser... Pourtant, et même si ça lui coûtait, il continua à rendre son regard à Olyssa, s’assurant de rester inexpressif. Il avait conscience que sa dernière phrase était de trop, un sarcasme qu’il aurait dû retenir parce qu’il ne le pensait pas. Mathias n’avait pas envie de blesser la Rouge et Or et pourtant... Et pourtant, c’était ce qu’il faisait parce que c’était ce qu’il savait le mieux faire et que c’était le plus facile à faire, aussi. Et il n’avait pas à culpabiliser pour ça, si ?

La jeune Nymfalis avait froid. Le fait qu’elle soit trempée contribuait sans nul doute à cet état. Il ne restait que des cendres dans la cheminée de la Salle des Préfets, et les murs froids du Château étaient tout sauf imperméables à l’humidité. Elle avait toujours détesté cette pièce remplies de livres sur le règlement de l’école. A croire que les Préfets étaient voués à l’étude et aux réunions. Or, ces réunions étaient rarissimes et aucun Préfet ne devait avoir comme passe-temps celui d’ouvrir des stupides bouquins sur les lois de Poudlard. Quoique…Beaucoup de Serdaigles auraient jugé ça intéressant. Les Préfets faisaient en général régner leurs propres lois, enlevant des points à volonté à ceux qui les ennuyaient et utilisant leur statut pour intimider, ce que soit dit en passant, Olyssa avait toujours trouvé très utile.

« Nymfalis. » Répondit le Préfet-en-Chef des Serpentards en guise de salutation. La Gryffondor comprenait mieux à présent pourquoi elle avait si froid. Le ton de Mathias Adams lui paraissait glacial. Quant à ses yeux qu’elle s’obstinait à fixer, ils ne dégageaient que de l’ennui. Ennui d’être obligé d’obéir au directeur et de transmettre des informations à son homologue de Gryffondor, ceci alors qu’il était bientôt huit heures du soir ? Ennui de se trouver en sa présence ? Sûrement les deux, songea la jeune Nymfalis, passablement agacée d’être considérée comme un facteur d’ennui.
« Nymfalis ». Mathias s’adressait à elle comme à une inconnue alors qu’elle l’avait salué par son prénom. Elle se sentait d’autant plus rabaissée. Mathias semblait aussi bien décidé à lui transmettre le peu d’intérêt qu’il lui apportait qu’à remettre sa fierté de Gryffondor en question. Oly, dont l’humeur n’était déjà pas partie sur de bonnes bases, sentit la colère, sentiment qui lui était si facile, monter en elle. Elle la ravala aussitôt et se contenta de modeler les traits de son visage en l’expression neutre de l’attente, même si son regard exprimait un mécontentement certain. Mathias était sensé avoir des choses à lui expliquer, non ?

« J’espère que tu as toujours ton badge, le Directeur ne m’en a pas donné un nouveau à te remettre. » Continua Mathias d’un air qu’il voulait nonchalant et détendu, ce qui acheva de parfaire l’humeur épineuse de la Gryffondor. Il s’était levé et elle remarqua de nouveau qu’il avait bien trop grandi. Olyssa se sentait d’autant plus diminuée, mais ça, elle voyait mal comment le lui reprocher (^^). Elle se contenta donc de hocher la tête en réponse, d’un air partagé entre le " bien entendu " et le " tu crois quand même pas que j’aurais jeté mon badge de Préfète-en-Chef ?! " - Même si elle pensait qu’elle terminerait ses études à Beauxbâtons, il fallait préciser que la jeune fille avait soigneusement gardé son insigne qu’elle affectionnait tout particulièrement. Ce n’était pas donné à tout le monde d’être Préfet-en-Chef, et elle en tirait un sentiment puéril de supériorité et de réussite.

Un silence déstabilisant s’était installé depuis bien trente secondes, ce qui en plus d’être gênant, titillait la patience si limitée de la jeune Nymfalis. *T’as quelque chose à me dire, ou pas ?* Oly aurait bien aimé repartir sur de bonnes bases avec Mathias Adams. En réalité, c’était l’une des choses qu’elle désirait le plus depuis son retour à Poudlard, et pour les sentiments qu’elle éprouvait manifestement toujours à son égard, et pour du moins maintenir leur relation amicale d’autrefois. Mais elle n’était pas dupe, et en réalité, n’était pas surprise par la réaction du Serpentard, même si l’anéantissement direct de ses espoirs lui donnait des envies oscillant entre une crise de larmes ou le meurtre. Attendant que le Serpentard trouve l’inspiration nécessaire pour reprendre la parole, la Gryffondor entreprit d’un air tout naturel, et fortement contradictoire avec son état de stresse actuel, d’essorer ses cheveux, laissant goutter l’eau qu’ils contenaient sur le sol, et de faire de cette boule de nœuds une tresse détrempée.
« Les Préfets sont toujours Norbert, Julie, Haypèn et O’Neill. Par contre, il y a eu des changements dans les profs, mais j’imagine que le directeur a dû t’en parler... En fait, je ne sais pas trop à quoi Hines s’attendait en nous demandant de nous rencontrer…» Recommença le Serpentard en rompant le silence qui s’était installé. A quoi Hines s’attendait ? *T’es mieux placé que moi pour le savoir normalement* songea férocement Oly en constatant que ses hypothèses sur l’ennui qu’elle procurait à Mathias étaient belles et bien fondées.
« …Alors... T’as des questions ? Ou je peux retourner faire quelque chose de plus intéressant... » Termina Mathias en concrétisant carrément les hypothèses d’Olyssa. La fatigue, le désespoir et les divers problèmes auxquels elle se voyait confrontée depuis deux jours s’affalèrent de tout leur poids sur la Gryffondor. Une sensation affreuse s’était logée dans son ventre, comme si on y serrait des nœuds avec une force démesurée. Oly avait envie de pleurer, définitivement. Il lui était dur de le reconnaître, et c’était un désir qu’elle avait refoulé si souvent qu’elle savait qu’elle ne parviendrait pas à l’exaucer. Certaines personnes affirmaient que pleurer, ou vider tout signe d’hydratation dans ses yeux selon Oly, soulageait énormément. Olyssa n’en savait rien. Elle ne pleurait plus depuis des années. Pas qu’elle ne le veuille pas, elle ressentait très bien la sensation qui précédait les larmes, mais elle n’y arrivait pas. Et là, on en venait à la colère. Il semblait que c’était par ce moyen que la jeune Nymfalis avait choisi d’évacuer.

« Des questions ? Oui j’en ai des tonnes à te poser, mais aucune ne concerne le sujet de notre " réunion " et puis…La pauvre imbécile infréquentable que je suis ne voudrait pas monopoliser le populaire Mathias Adams ! » Lâcha Oly d’un air aussi narquois que furieux. Elle n’avait jamais prévu de s’énerver, mais Mathias en avait décidé autrement.
« Je crois que Seeley Holmes aimerait beaucoup te voir…ça serait dommage de la faire attendre. » Termina la Gryffondor d’une voix teintée d’amertume, le regard glacial, avant de s’asseoir dans le fauteuil le plus proche et de sortir son livre de Botanique. Elle savait que son attitude était des plus déconcertantes, surtout pour elle-même. Elle désirait être le plus loin possible de Mathias. Si celui-ci interprétait ce qu’elle venait dire comme autre chose que de la jalousie pure, c’était un miracle. Mais elle, au lieu de s’éloigner, ce qui aurait était le mieux à faire dans cette situation, elle décidait de rester là. Pourquoi ? Pour la simple raison qu’elle ne voulait pas fuir devant Mathias. Elle se mit à survoler les lignes du chapitre sur l’Aconit d’une manière totalement inapte à la lecture, espérant de tout son cœur que le Serpentard aurait le bon sens de ne rien répondre de plus blessant et de s’en aller…

Ses longs cheveux lamentablement écrasés sur son crâne par le poids de l’eau, encadrant pitoyablement son visage, ses vêtements assombris et alourdis par l’humidité, sûrement glacés aussi, pendus piteusement à ses épaules et une flaque d’eau grandissant tranquillement autour de ses chaussures, comme si son corps entier, à l’exception de ses yeux, pleurait ; Olyssa offrait au regard un spectacle navrant, prompt à attirer la pitié. Pourtant, son regard exempt de larmes démentait une quelconque faiblesse. Elle ne baissa à aucun moment les yeux, le visage de marbre et les prunelles brillantes de contrariété. L’image même d’une battante.

Quelque part, au-dessus de l’admiration muette du Préfet-en-Chef pour la force de caractère de sa collègue, Mathias fut vexé du l’absence de réaction de l’adolescente. Il avait beau savoir qu’Olyssa se fichait de lui, qu’on ne pouvait pas lui faire confiance, il avait quand même pensé, espéré peut-être, que la cinquième année tenterait une explication. Il ne voulait pas nécessairement des excuses, même si ça n’aurait vraiment pas été de trop, mais au moins qu’elle ait l’air de regretter... Et rien. Elle se contentait de rester bien droite, la tête haute, à lui rendre son regard pendant qu’elle l’écoutait... ou faisait semblant. À un moment, elle entreprit même, apparemment distraitement, de mettre un peu d’ordre dans sa coiffure. Geste vain et futile...

Mais à quoi s’attendait-il réellement de ce premier face-à-face ? Si la jeune Nymfalis était partie sans rien dire, pouvait-on sincèrement croire qu’elle reviendrait en pleurant ? qu’elle croirait nécessaire de demander pardon ? Avait-elle seulement conscience d’avoir été blessante ? Peut-être était-elle ainsi, capable de passer à autre chose comme on tourne la page d’un livre. Elle avait peut-être quitté Poudlard sans même un regard en arrière pour atterrir à Beauxbâtons et y agir comme si elle y avait toujours vécu. Et peut-être avait-elle fait exactement la même chose, mais à l’envers, en cette fin d’octobre... Peut-être qu’elle croyait que Poudlard avait arrêté de vivre pendant qu’elle était absente et qu’en reposant le pied sur le sol du Hall, elle aurait repris sa vie à Poudlard là où elle l’avait quitté, sans que rien n’ait évolué. Tellement de peut-être... Et aucune réponse ne paraissait se pointer à l’horizon. Évidemment, Mathias aurait pu poser toutes ses questions. Toutefois, pour cela, il aurait dû accepter de montrer à Olyssa qu’elle lui avait manqué... Une chose qu’il n’arrivait même pas à s’admettre à lui-même.

Finalement, après un temps qui semblait interminable (D’un autre côté, Mathias avait l’impression que l’écoulement du temps avait douloureusement ralenti depuis qu’ils étaient tous les deux enfermés dans cette pièce poussièreuse.), Olyssa desserra les lèvres. À son ton de voix, il réalisa qu’il l’avait sous-estimé... Elle n’était pas agacée, mais bien furibonde. Pourquoi d’ailleurs ? C’était à lui d’être furieux contre elle, pas l’inverse ! Lui, il n’avait strictement rien à se reprocher ! Alors que elle...

Des questions ? Et bien qu’elle les crache ses questions ! Il les attendait de pied ferme ! Pauvre imbécile infréquentable, hein ? C’était quoi cet auto-dénigrement ? Voulait-elle qu’il la contredise, qu’il lui dise un truc bateau du genre ‘Mais non Olyssa, ne dit pas ça, tu es tout à faire charmante.’ ? Elle cherchait à se faire plaindre, c’est ça ? Encore une espèce de ruse féminine... Quoiqu’il en soit, elle allait les attendre longtemps ses compliments ! Et que reprochait-elle au fait qu’il soit connu au juste ? Ce n’était pas comme si c’était quelque chose de nouveau... Néanmoins, le bouquet vient dans la phrase suivante, la dernière que la jeune femme prononça avant de s’enfermer dans le mutisme...

"Holmes ?" , répéta le Serpentard, si surpris qu’il en perdit son masque neutre.

Comment est-ce que la Serdaigle avait pu s’infiltrer dans la conversation ? Ça débarquait vraiment de nul part cette remarque ! C’était comme si un type parlait du mouvement de baguette à effectuer pour lancer correctement un Expelliarmus et qu’il disait soudainement ‘Au fait, c’est très bon le jus de citrouille !’. Com-plè-te-ment hors-sujet ! En fait, cette mention de Seeley, débarquant de nul part et sur un ton si froid, ça avait tout l’air d’un accès de jalousie... Mais c’était impossible. Déjà, Olyssa ne pouvait pas être jalouse parce que, pour ça, il faut être amoureux. Ensuite, à supposer qu’elle soit jalouse pour autre chose, un truc plus gamin du genre ‘tu m’as piqué mon ami’, pourquoi de Seeley Holmes ? Mathias lui avait parlé, quoi... trois fois au total ? Et jamais avant que la Gryffondor ne parte de Poudlard... Vraiment, les filles, il n’y avait rien à y comprendre !

Assise, un livre à la main, l’ancienne ex-Préfète-en-Chef semblait avoir décidé de bouder. Elle n’avait pas l’air des plus glorieuses avec sa tresse noueuse et ses vêtements qui ne montraient même pas le moindre petit début d’assèchement. Par ailleurs, il était fort probable que son livre n’était pas en reste niveau accumulation aqueuse. L’Impervius est un sortilège utile, mais il a quand même ses limites... Et pourtant, Olyssa restait fière, inébranlable malgré l’illogisme de ses actions. Si elle voulait conclure la rencontre, elle aurait dû partir... Surtout qu’elle devait rêver d’enfiler quelque chose de sec... Mais non !

Bref, puisque la Rouge et Or ne paraissait plus disposée à faire autre chose que l’ignorer, Mathias se retrouva face à un dilemme. Que devait-il faire maintenant ? L’idée la plus tentante était de simplement passer la porte, sans rien ajouter. C’était aussi la plus facile, d’une certaine façon, sur le court terme... Et puis, il avait su avant même qu’elle ne commence qu’il ne sortirait rien de bon de cette réunion... Pourtant, quitter les lieux le premier, est-ce que ça pouvait passer comme un abandon ? Si Olyssa ne l’avait pas vu ainsi, elle serait parti, elle n’aurait pas stupidement ouvert un bouquin débile pour faire semblant de lire ! Elle voulait être la dernière à partir, comme si c’était un jeu de ‘qui aura le dernier mot’ silencieux. Elle ne l’emporterait pas aussi facilement !

"Vas-y, pose tes questions... qu’on en finisse." , déclara placidement Mathias, la fin de la phrase étant beaucoup moins audible que son début. Croisant les bras, il démontra par son attitude qu’il ne bougerait pas de là. En tout cas, pas le premier...

La Gryffondor avait conscience d’avoir été ridicule dans ses propos, tous aussi contradictoires et révélateurs les uns que les autres. Mais étrangement, elle n’en éprouvait presque aucune gêne. Elle savait pertinemment que dès qu’elle se retrouvait face au jeune Adams et qu’une dispute éclatait, fait assez traditionnel, elle perdait tous ses moyens. On en venait alors souvent à des argumentations très limitées, complètement exemptes de logique et parfois même de sens. La réponse furieuse qu’elle venait de formuler à Mathias en était une preuve indéniable. La jeune Nymfalis se demandait avec un mécontentement grandissant si le Serpentard éprouvait un sentiment de satisfaction à présent, ayant parfaitement réussi à l’énerver et même à lui faire avouer sa jalousie, et donc, des sentiments qui s’étaient détournés nettement de la simple amitié. Olyssa enfonça un peu plus le nez entre les pages de son livre de botanique, redoutant maintenant de croiser le regard de Mathias. Elle ne voulait surtout pas voir sa réaction, les sentiments qui s’affichaient sur son visage dans ce long silence : Etonnement ? Colère ? Joie du triomphe ? Oly avait trop peur de sa réaction et décida fermement de rester enfermée dans l'indifférence et le mutisme. Il semblait qu’elle retrouverait la faculté de la parole uniquement Mathias parti…

Néanmoins, le Serpentard n’en était pas du tout arrivé aux mêmes conclusions que la Gryffondor. Il restait planté là, les mains dans ses poches, à deux mètres de la jeune Nymfalis. Oly ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Comment avait-elle pu croire que Mathias la laisserait tranquille après ça ? Ils avaient toujours eu un rapport de confrontation obstiné, se querellant pour obtenir le dernier mot, la dernière réplique tranchante, celle qui ferait le plus de dégâts et désignerait le vainqueur du " combat verbal ". Un rapport de confrontation descendant directement de leurs caractères trop fiers, trop arrogants…Mathias remportait cependant bien plus souvent ces guerres qu’ils se menaient. Olyssa devait reconnaître qu’elle supportait difficilement de pratiquer cette adversité avec Mathias, adversité qui était pourtant l’une de ses activités favorites au château. Toujours avoir le dernier mot. Mais avec le Préfet-en-Chef, c’était différent. Elle n’éprouvait aucune joie en se confrontant en lui, encore moins en l’emportant sur lui. Pour elle c’était une nette souffrance, un combat qui semblait obligatoire et pourtant sans saveur, sans intérêt. Elle ne voulait pas être supérieure à Mathias, simplement qu’il la considère comme son égale, mais le Serpentard en paraissait incapable.

« Holmes ? » Prononça Mathias en brisant le silence, une intonation de surprise non dissimulée dans sa voix. Oly osa enfin lever les yeux de son livre, essayant de cacher l’appréhension qu’elle ressentait. Elle aurait voulu ne plus rien entendre venant de l’héritier Adams. Pourtant, celui-ci restait ici, la forçant à l’écouter, lui imposant souffrance et indécision : Partir ? Le laisser gagner ? Ou rester, le défier, en tentant de cacher les coups qu’elle prendrait à chaque réplique ?

Oly resta. Elle scruta d’un air sceptique les traits si attirants du Préfet-en-Chef. Il semblait sincèrement surpris, en colère aussi. La jeune sorcière ressentit soudain un doute. Et si Mathias et Seeley n’entretenaient pas le rapport qu’elle avait cru voir la veille ? Et si elle s’était trompée ? Olyssa enfonça sensiblement ses ongles dans l’accoudoir par-dessus lequel elle avait passé ses jambes, se donnant ainsi un air plus détendu. Elle venait de vendre ses sentiments au jeune Adams à travers un motif de jalousie injustifié ? *Idiote !* songea Oly avec résignation, ne parvenant pas à ouvrir la bouche pour répliquer.

« Incendio ! » prononça finalement un peu trop vivement la jeune Nymfalis, pointant sa baguette magique vers la cheminée. L’agréable chaleur des flammes vint aussitôt lécher le visage de la Préfète-en-Chef des Gryffondors, apparemment de retour en Olyssa Nymfalis. Elle jeta un regard froid et déterminé à son homologue de Serpentard, malgré sa récente bourde. Elle savait que leur petit jeu était d’un puéril inégalable. Ils étaient en cinquième année maintenant, et pourtant toujours aussi têtus. Tellement, que leur obstination dérivait vers la bêtise. Pourtant, elle ne bougerait pas d’ici avant lui, se promit la Rouge et Or, la lumière éclatante du feu venant mettre en valeur les couleurs de sa robe de Quidditch.

« Vas-y, pose tes questions... qu’on en finisse. » Reprit froidement le Serpentard. Ah, il s’intéressait apparemment quand même à ce qu’elle lui avait dit, contredisant ses anciennes positions, c’est-à-dire celles de l’adolescent ennuyé d’avoir à lui parler et qui voulait s’écarter d’elle le plus vite possible. Mathias Adams, curieux ? Oly parut un instant prise au dépourvu. Elle avait pensé que l’adolescent répondrait du ton cassant, où il excellait tant, à sa provocation sur sa popularité et le peu d’attention qu’elle méritait venant de lui. Mais il semblait plutôt s’intéresser à la phrase qui précédait celle-ci, celle qui en réalité, était la plus dangereuse pour la jeune fille. Elle avait en effet beaucoup de questions à lui poser, mais la plupart trahiraient aussitôt son attirance pour le Serpentard, et elle en avait déjà fait assez précédemment avec l’évocation de Seeley Holmes. Néanmoins, elle n’avait plus rien à perdre, une vérification était nécessaire, et puisque Mathias lui offrait l’occasion de donner une réponse à ses questions…

« Est-ce que…Tu…Tu ne sors pas avec Seeley Holmes ? » Demanda d’une voix intriguée Olyssa. Les battements de son cœur s’étaient nettement accélérés. Elle redoutait la réponse de son homologue.
« Et pourquoi me fais-tu payer mon retour de cette manière ? Pourquoi tu te conduis comme si…comme si j’étais la personne à éviter absolument ? » Reprit la Gryffondor, la tristesse résonnant clairement dans sa voix alors qu’elle se redressait sur son fauteuil pour replier ses jambes contre son corps, les entourant de ses bras et offrant son dos à la cheminée, à la seule source de chaleur de la pièce, comme pour chercher un réconfort vain aux réponses douloureuses qu’allait sûrement émettre le jeune Adams. L’avait-il oublié ? N’avait-elle plus aucune valeur à ses yeux ? Avait-il honte d’avoir pu entretenir des rapports avec elle qu’on pouvait qualifier d’amicaux à une époque ? Oly enfonça son menton entre ses genoux, la lumière du feu se reflétant dans ses yeux, des yeux brillants qui regardaient à présent dans le vide d’un air perdu.

L’avait-il seulement appréciée ? N’avait-il pas entretenu un jeu ? Se demanda la jeune sorcière, un nouveau doute s’instillant en elle. Mathias parlait autrefois volontiers avec elle, cherchait même parfois à la voir de sa propre initiative…Mais tout ça était bien loin, bien trouble, et la jeune Nymfalis était de moins en moins sûre de ses souvenirs. N’était-ce pas elle en réalité qui venait toujours à sa rencontre ? N’en avait-il pas marre du pot de colle Gryffondorien qui ne le lâchait pas pendant leurs périodes de surveillance dans les couloirs ? Oly ressentit une profonde douleur dans sa poitrine, près de son cœur, elle n’avait jamais vu les choses sous cet angle, mais après tout c’était fort possible. Le fait qu’elle ait pu passer pour un boulet, une groupie auprès de Mathias la brûla internement.

Pourtant, leur rencontre n’avait jamais été prévue par la Gryffondor, jamais calculée, songea Olyssa, s'éloignant dans ses souvenirs. Ils étaient en première année, la nuit était tombée depuis bien longtemps, se remémora la jeune Nymfalis, aussi clairement que si cela s’était produit à l’instant. Oly connaissait bien sûr le jeune Adams de vue, lors de leurs cours de potions notamment, mais elle n’appréciait pas les Serpentards. Pourtant, lorsqu’ils s’étaient retrouvés nez à nez dans l’obscurité du parc, lorsqu’ils avaient malmené la jeune Mina Lempin par pur divertissement, Oly s’était sentie terriblement serpentardesque. Après tout, le Choixpeau avait longuement hésité entre la maison des Serpents et celle des Lions pour son cas. Les jeunes Adams et Nymfalis, à sa propre surprise, s’étaient étonnement bien entendu, et après s’être fait poursuivre par le concierge dans les couloirs du château, s’étaient réfugiés et endormis dans la Salle sur Demande. Ainsi avait débuté la relation complexe Adams/Nymfalis et les années étaient passées, les choses avaient changé. Avec une poussée de mélancolie, Olyssa se demandait à présent si leur amitié allait se terminer ainsi, si le Serpentard avait considéré la Gryffondor comme un simple objet de manipulation, si celui-ci comprendrait un jour par lui-même ce qu'elle avait pu ressentir pour lui, et ressentait apparemment toujours…

Perplexe, presque hésitante même, Olyssa se détourna de sa pseudo-lecture. Car Mathias n’était pas dupe... Elle ne pouvait pas tout d’un coup se plonger dans un bouquin, comme ça, en plein milieu d’une confrontation. Il était plus plausible de croire que ça n’avait été qu’un prétexte pour détourner le regard sans avoir l’air de capituler. Ce n’était pas une façon de gagner, mais plutôt de ne pas perdre... Entre têtes de mule, ça finissait souvent comme ça. Un accord tacite était passé, permettant aux deux parties de partir bouder chacun de leur côté en se bornant à croire qu’ils avaient eu raison. Néanmoins, cette fois, c’était différent... Parce que Mathias n’avait pas agit comme il aurait dû. Ce qu’il aurait normalement eu à faire, c’était de lui aussi se murer dans l’indifférence. Au lieu de quoi, il avait répondu, forçant la Gryffondor à revenir ‘se battre’... Et Olyssa, en jeune femme orgueilleuse n’avait eu d’autre choix que de répondre à l’appel.

En un premier tant, l’adolescente ne dit rien. Elle se contenta de lui rendre son regard et il était difficile de deviner ce qui se tramait dans ses pensées. Allait-elle monter sur ses grands chevaux ? S’insurger contre le fait que le Préfet-en-Chef n’avait pas saisi son allusion ? Ou peut-être resterait-elle plus froide, plus distante, répondant avec sarcasme à son interrogation incrédule. Les filles étaient très fortes pour reprocher aux garçons de ne pas comprendre ce qu’elles pensaient. Olyssa lui avait même déjà fait le coup, il y avait quelques années, après un cours de botanique plutôt anarchique...

Finalement, la jeune Nymfalis n’exprima rien de cela. Elle sortit plutôt sa baguette magique... Voulait-elle l’attaquer ? Pendant une seconde, Mathias se crispa imperceptiblement, se demandant s’il devait faire de même. Ce n’était pourtant pas le genre d’Olyssa de réagir violemment... D’un autre côté, il n’aurait jamais cru non plus que c’était le genre d’Olyssa de partir sans dire au revoir...

Heureusement, la Préfète-en-Chef n’avait pas l’intention de se lancer dans un duel. Elle se contenta de relancer le feu tari de la cheminée. Comme si la chaleur lui redonnait de l’énergie, elle se réintéressa ensuite à son confrère, son regard aussi glacé que la banquise. Était-elle encore plus en colère maintenant que sa bouderie avait été interrompue ? Elle aurait assurément préféré en rester là, mais Mathias n’avait aucune envie d’écouter les désirs de le Rouge et Or. Elle ne pouvait pas s’attendre à toujours avoir ce qu’elle voulait...

Et puis vint la réponse d’Olyssa. Elle avait visiblement eu du mal à la formuler et buta à deux reprises avant de parvenir à conclure son interrogation. Cependant, une fois lancée, elle ne s’arrêta pas là et posa au total trois questions avant de se taire de nouveau. Son ton de voix avait changé... Il n’y avait plus aucune trace de colère dans ses propos, même pas une légère irritation. L’adolescente semblait seulement abattue. Difficile à croire, mais également pénible à endurer. La Gryffondor était normalement l’exemple même de sa Maison, une combattante féroce qui ne se laissait jamais impressionnée. Elle n’avait pas le droit de changer, de sembler soudainement si... vulnérable. Un peu plus tôt, son regard avait démenti son état misérable, mais plus maintenant. Ses jambes ramenées contre elle, le regard perdu, elle était l’incarnation de la faiblesse. C’était une chose à laquelle Mathias ne savait pas faire face. Pourquoi se revirement de situation avait-il eu lieu d’ailleurs ?

S’il n’avait écouté que son instinct, l’héritier Adams aurait été porté à vouloir réconforter Olyssa. Il n’aimait pas la voir ainsi. Même s’ils passaient leur temps à s’envoyer des bêtises à la tête, le Préfet-en-Chef préférait sans hésitation cela à cette attitude prostrée. Toutefois, sa tête lui interdisait de céder à la compassion. Ç’aurait été la laisser gagner... Oui, c’était une façon totalement puérile de réfléchir. Et alors ? Si les rôles avaient été inversés, Olyssa aurait-elle cherché à la réconforter ? Quelle idée ridicule... Jamais Mathias ne se serait laissé aller à jouer la carte de la pitié... Et la Préfète-en-Chef n’aurait pas dû le faire non plus ! Finalement, le Serpentard choisi de conserver une relative sécurité et lâcha une exclamation dédaigneuse. En même temps, cela lui donna l’occasion de détourner le regard du spectacle déchirant d’une Olyssa désemparée. Comment aurait-il pu camper sur ses positions en continuant de la regarder ? Ç’aurait été trop dur...

La première question posée par Olyssa était la plus invraisemblable. Encore et toujours Seeley Holmes... Pourquoi s’intéressait-elle à ses relations ? Pourquoi cette... jalousie ? Parce qu’il était maintenant clair qu’il n’y avait pas d’autre explication à cette fixation sur la Serdaigle. Incapable de faire autrement, le regard de Mathias revint se poser sur la jeune Nymfalis, sceptique. Olyssa était-elle amoureuse ? de lui ? Sans que l’adolescent ne comprenne pourquoi, à cette idée, une étrange chaleur enveloppa son coeur. Certes, l’héritier Adams n’était pas aveugle. Il savait qu’il y avait des filles amoureuses de lui. Après tout, il était de Sang-Pur, riche, beau et Préfet-en-Chef, donc populaire et, à petite échelle, influant. Néanmoins de la part d’Olyssa, c’était... différent. Inexplicablement inattendu.

Les deux autres interrogations de la Préfète-en-Chef étaient plus prévisibles, bien que cela ne leur enlève pas leur côté déplacé. Alors la Gryffondor avait réellement et naïvement cru qu’on accueillerait son retour à Poudlard à bras ouverts ? Après la façon dont elle était partie ? Quel égocentrisme... Le côté blessé (peut-être légèrement paranoïaque aussi) de Mathias lui soufflait que c’était possiblement une ruse, une tactique de manipulation destinée à retrouver sa confiance en lui inspirant la pitié. Par contre, plus rationnellement, l’italien était hésitant, se demandant s’il était possible d’être à ce point vicieux. Surtout qu’Olyssa n’était même pas une Serpentard... Si elle avait été Kalinah, alors il n’y aurait pas eu d’incertitude possible. Ça aurait évidemment été de la manipulation pure et simple, comme tout ce qui animait les actions de la Capitaine de Quidditch. Dans ses souvenirs pourtant, la Préfète-en-Chef avait beau avoir été la meilleure amie de l’héritière Horuni, elles avaient toujours eu des caractères bien distincts. Peut-être que la façon dont était parti la jolie blonde n’avait été qu’une erreur de sa part... Les Gryffondors ne réfléchissent pas avant d’agir, c’est bien connu. Pouvaient-ils être mal élevés au point de disparaître sans prévenir ? Olyssa avait-elle fait la même chose à tout le monde ? À Kalinah aussi ?

"Peut-être que je ne fais que te rendre la monnaie de ta pièce..." , répliqua finalement Mathias, s’efforçant de rester neutre et ignorant délibérément la première interrogation d’Olyssa.

S’il n’avait pas été un monstre d’orgueil, il aurait pu lui expliquer la trahison qu’il avait ressenti lorsqu’il avait appris, lors d’une réunion de Préfets parmi tant d’autres, que la jeune Nymfalis ne viendrait plus à ces réunions. Qu’il ne la verrait ni en classe ni même dans un couloir ou dans la Grande Salle. Il aurait également pu lui avouer qu’il avait espéré son retour, que leurs conversations lui manquait et qu’une simple lettre lui aurait apporter au moins quelques réponses et un peu d’apaisement. Il aurait ensuite essayé, de but en blanc, d’avoir les explications qu’il attendait depuis un an et demi... Mais Mathias ne pouvait rien faire de tout cela parce que sa fierté le lui interdisait. Dire ce genre de chose, montrer ce qu’il avait ressentit, c’était trop lui demander. Il ne pouvait tout simplement pas s’exposer de la sorte, avoir l’air si... désarmé.

"Et je suis toujours célibataire." , ajouta-t-il après un instant.

C’était une phrase qui portait à rire, ou au moins à sourire, tellement ce type de propos était ridicule par rapport à la situation, mais le Serpentard resta impassible. En fait, il détailla avec insistance, bien qu’il s’assura de conserver son air détaché, les traits fatiguées de son interlocutrice, cherchant quel genre de réaction cette réponse provoquerait. Étrange comme ce sujet avait finalement beaucoup plus d’importance pour les deux jeunes gens qu’il n’y paraissait...

[ - HJ - * Essaie d'être aussi ponctuelle dans ses réponses que son interlocuteur * ]

Olyssa attendait les réponses du Serpentard avec une angoisse évidente. Elle serrait un peu plus fort ses jambes repliées contre elle, fixait intensément le visage de Mathias. A sa première question, celle concernant sa relation avec Seeley Holmes, une expression inhabituelle se peint sur le visage du jeune Adams. Il paraissait décontenancé, et autant préciser que venant de la part du Préfet-en-Chef de Serpentard, c’était un évènement qui défiait presque la réalité. En même temps, la jeune Nymfalis ne respectait pas exactement sa réputation non plus ce soir-là. Elle ne cachait plus ni sa tristesse, ni la jalousie qui la rongeait depuis la veille. Etait-ce ça qui perturbait tant Mathias ? Etait-ce le fait qu’elle lui montrait directement sa faiblesse et ses regrets ? Etait-ce parce qu’elle lui laissait comprendre qu’elle était jalouse ? Oly ignorait tout des pensées du Serpentard, et pourtant, elle eut l’impression d’avoir parcouru avec lui un chemin plus long en quelques minutes que durant leurs trois premières années à Poudlard. Son état d’esprit venait de se modifier brusquement, elle se sentait plus libre, et à la fois contrariée d'avoir dévoilé sur un coup de tête ce qu'elle avait si bien dissimulé.

Ce que la Gryffondor avait tenté de se refuser pendant des années, ce qu’elle avait caché obstinément, venait d’être plus ou moins révélé impulsivement par sa colère. Comment Mathias réagirait-il ? La jeune sorcière espérait qu’il n’aborderait pas le motif de son intérêt pour sa relation avec Holmes. Son désir présent était d’ignorer totalement ce que pensait le Serpentard à son propos, à propos de ce qu’elle venait de révéler. Mais Mathias n’était-il pas fourbe comme l’étaient tous les élus de la maison du Serpent ? Mathias n’aurait-il pas intérêt à parler d’elle à ses amis Fenrir et Lizak pour trouver dans son cas un sujet d’amusement ? Oly chassa ses peurs. Elle pourrait toujours avancer des excuses valables, elle en avait déjà plusieurs à l’esprit, pour faire passer le Serpentard pour un abruti si imbu de lui-même qu’il se voyait des prétendantes partout, même en la personne de la Préfète-en-Chef de Gryffondor. Olyssa réalisa soudainement qu’elle était déjà entrain de prévoir des plans de contre-attaque, avant même avoir pu évaluer la réaction du Serpentard. Elle venait de se désarmer, certes, mais elle avait toujours une idée de secours à sa disposition.

« Peut-être que je ne fais que te rendre la monnaie de ta pièce... » Finit par prononcer l’héritier Adams d’une voix qu’il voulait neutre. Olyssa ne put s’empêcher de paraître surprise et fronça nettement les sourcils. Lui rendre la monnaie de sa pièce ? Avant son départ, le Serpentard et la Gryffondor étaient revenus en de bons termes…C’était donc le départ brusque de la jeune Nymfalis qui était à l’origine de la colère de Mathias ? Mathias aurait voulu qu’elle le prévienne, lui envoie des lettres pour lui donner de ses nouvelles ? Oly était à présent totalement et définitivement perdue. Elle s’était trompée de A à Z, de Kali à Mathias. Après son arrivée à Beauxbâtons, elle avait écrit durant quelques mois à sa meilleure amie, puis avait volontairement interrompu leur correspondance, souffrant de ce lien qui la retenait encore à Poudlard, à ses souvenirs et son passé qu’elle avait tant de difficulté à laisser derrière elle. Elle savait quelle douleur c’était pour Kali, qui continuait à lui envoyer régulièrement des lettres auxquelles elle ne répondait pas. Puis elle avait fini par comprendre, un mois plutôt, quelle erreur elle avait commise. Couper le lien avec Kali ne lui avait en rien permis de tourner complètement la page, mais avait entraîné la colère de la Serpentard à laquelle elle avait pu assister deux jours plutôt.

Apparemment, c’était le même cas pour Mathias, à un degré moins élevé. Mais ceci, Oly n’aurait jamais pu le prévoir. Comment aurait-elle pu imaginer que le Serpentard tenait un minimum à elle ? Elle avait songé à lui écrire, mais s’était ravisée. Olyssa Nymfalis écrire une lettre à Mathias Adams ? Et puis quoi encore ? Révéler directement un attachement certain à celui-ci, mais également à tous les Serpentards qui se trouveraient aux alentours au petit-déjeuner, lorsque Mathias recevrait le hibou ? Olyssa avait pensé qu’elle n’avait pas assez de valeur pour le Serpentard pour qu’elle se permette une lettre d’explication, qui avait-elle pensé, aurait animé soit le scoop de l’année à Poudlard, soit les simples moqueries de Mathias et de ses amis. Elle avait donc ravalé l’idée de donner des nouvelles au Préfet-en-Chef. Quant à son départ précipité, le fait que la seule personne à avoir été au courant avait été Kalinah Horuni deux jours à l’avance s’expliquait simplement. Oly l’avait appris au même moment que celle-ci, recevant la maudite lettre de sa mère en présence de Kali. Les deux jours suivants avaient été dédiés à la préparation de ses bagages, aux discussions avec les professeurs et le directeur. Ses seules heures libres étaient passées avec la jeune Horuni, souvent dans un silence d’une tristesse inconcevable et opressante. Oly ne parvenait pas à comprendre comment le monde dans lequel elle vivait depuis des années allait subitement disparaître, s'effondrer, et en aucun cas elle ne songea à mettre qui que ce soit au courant, mis à part sa meilleure amie. Elle ne voulait ni lancer les commérages qui se répandaient si vite à Poudlard, et pour la même raison que son absence de nouvelles, elle croyait dur comme fer qu’elle n’était pour Mathias qu’un passe-temps lors de leurs heures de surveillance. Bref, d’après les apparences, Oly s’était trompée sur toute la ligne.

« Et je suis toujours célibataire. » Rajouta le Serpentard d’une manière inattendue et étonnamment sérieuse étant donné le contexte et le silence qui avait suivi sa première phrase. Oly ne comprit pas pourquoi elle ne parvint pas à respirer durant un instant. Elle avait l’impression qu’une explosion de bonheur déferlait en elle. Un sourire de soulagement vint illuminer son visage, pour la première fois depuis qu’elle était en la présence de Mathias. Prenant conscience qu’elle était entrain de confirmer ce que Mathias avait déjà du comprendre lors de sa " crise de jalousie ", elle se mordit durement la lèvre en tournant la tête derrière le rideau de cheveux trempés s’échappant de sa " tresse ", avant de se remettre à regarder Mathias, son sérieux retrouvé.

« Lorsque j’ai appris que je partais à Beauxbâtons, seule Kali a été mise au courant, commença-t-elle d’un air gêné, Je ne pensais pas que ça aurait de l’importance pour toi de savoir ça. Quant à donner des nouvelles, je n’ai respecté ça avec personne, pas même avec ma meilleure amie…Par rapport à ça, je comprendrai donc que tu veuilles me rendre la monnaie de ma pièce, si c'était bien sûr de ça que tu voulais parler…» Termina Oly d’une voix calme, une voix triste. Elle savait qu’une suite était indispensable à ce qu’elle venait de dire, mais elle ne parvenait pas à prononcer les mots, sa fierté les empêchant de sortir de sa bouche.

« Je…suis désolée » Finit-elle par dire, sa voix se terminant dans un murmure. Les mots semblaient lui avoir arraché la bouche. Elle replanta pourtant ses yeux dans ceux du Serpentard, ne tenant pas à se rabaisser jusqu’au bout. Mathias considérerait sûrement cette action comme une victoire, mais Olyssa devait s’avouer qu’il était nécessaire qu’elle l’accomplisse. Elle avait eu tort, et même si reconnaître ce fait devant le Préfet-en-Chef n’avait pas été une partie de plaisir, elle était satisfaite d’avoir réussi. La jeune sorcière espérait à présent de toutes ses forces que l’adolescent la pardonnerait…Elle ne se faisait néanmoins pas trop d’espoir, et tout comme elle l’avait prévu avec Kali, si Mathias souhaitait ne plus lui adresser la parole, elle décida qu’elle l’accepterait avec toute la dignité dont elle était capable.

« Le riche et puissant Mathias Adams célibataire…Etonnant » Conclut Oly d’un air amusé, légèrement narquois, tentant de détendre vainement l’atmosphère. Elle aurait bien aimé à présent que Mathias oublie ses allusions sur Seeley Holmes, et jouer l’indifférente lui semblait assez adapté.

[Lol. Mais c’est moi qui essayait de suivre ton rythme ! Enfin, parce qu’on est la fin de semaine... Je pourrai pas garder cette allure en semaine...]

À l’annonce du célibat de Mathias, l’expression peinte sur le joli minois d’Olyssa changea du tout au tout. Plus aucune trace de tristesse ou de colère... On aurait dit un jeune enfant à qui on vient d’apprendre que Noël est en avance cette année. Ses lèvres s’étirèrent en un grand et magnifique sourire, ses yeux pétillèrent de joie et même dans ses vêtements en état déplorable, elle avait l’air radieuse. C’était une réaction... curieuse. Mathias, dont le coeur avait recommencé à battre trop fort, n’était pourtant pas certain de savoir si c’était celle qu’il attendait. Alors Olyssa avait bel et bien été jalouse ? Était-ce une bonne chose ? N’était-ce pas... dangereux pour leur amitié ? Si bien sûr ils finissaient par se réconcilier... Mais ils se raccommodaient toujours de toute façon. Le Serpentard était incapable de garder longtemps rancune à la blondinette. Elle était d’ailleurs la seule a avoir ce pouvoir sur lui... Difficile d’en expliquer la raison. Il suffisait qu’elle le regarde avec ses grands yeux turquoises pour qu’il oubli toutes ses contrariétés, qu’il n’ait plus qu’une envie : la prendre dans ses bras et... Et on avait pas ce genre de pensées pour une amie normalement. Si ?

Comme si elle avait eu tord de montrer sa jubilation, Olyssa se reprit bien vite. Elle détourna la tête un instant, tentant peut-être de cacher son visage derrière les quelques mèches qui avaient échappées à sa tresse. Lorsqu’elle rendit de nouveau son regard au Préfet-en-Chef, elle était redevenue plus neutre, plus sereine. Elle fit comme si la discussion à propos des relations amoureuses du jeune Adams n’avait pas existée et, enfin, lui apporta des réponses...

Alors Kalinah avait bel et bien été au courant des détails ? Avoir su... Non, en fait, même s’il l’avait su, ça n’aurait rien changé. Il n’aurait pas davantage parlé à la Serpentard pour obtenir lesdits détails. Et même s’il avait décidé de s’humilier à le faire, il ne serait probablement rien sortit d’autre de la bouche de la jeune Horuni qu’un grand rire moqueur. Ça l’aurait beaucoup amusé d’avoir en sa possession quelque chose que Mathias désirait... Bref, Horuni était détestable, même en pensé.

Olyssa avait cru qu’il se fichait de la voir partir ? À cette révélation, Mathias fut partagé entre l’étonnement et l’offense. D’accord, il n’avait jamais clairement exprimé qu’elle était, pour lui, une amie, mais... Qu’est-ce qu’elle pensait de lui exactement ? Qu’il considérait les gens comme des êtres interchangeables ? Avait-elle toujours vu son homologue comme un simple collègue, un camarade d’école qu’on oublie une fois les vacances scolaires arrivées ? Pourtant, elle était clairement jalouse du fait qu’il voit d’autres filles... C’était illogique... Alors, peut-être l’intimidait-il ? Avait-elle eu peur de lui écrire ? C’était-elle sous-estimée, se croyant moins qu’une amie à ses yeux ? Il ne lui parlait quand même pas par obligation ! Elle ne pouvait pas penser une telle chose ! Le fait que la Préfète-en-Chef confesse n’avoir écrit à personne d’autre non plus ne calma qu’à moitié l’héritier Adams. L’idée qu’Olyssa soit si peu sûre d’elle était déroutante...

Et puis l’adolescente le surpris de nouveau. Avec une difficulté visible et que Mathias était l’un des mieux placés pour comprendre, Olyssa demanda pardon. Elle réussit même, ensuite, à le regarder dans les yeux. Si c’était de la comédie, elle méritait vraiment un trophée ! Son regard était tellement honnête... Le Serpentard aurait aimé pouvoir y résister, mais il se connaissait. Malgré un an et demi de colère accumulée, il avait du mal à rester rancunier envers l’adolescente et ce depuis le début de la rencontre. Il avait dû se répéter toutes les raisons qu’il avait de la détester pour réussir, jusque là, à conserver une attitude détachée. Ça n’aurait pas été si difficile si la Rouge et Or était restée sur la même ligne de conduite qu’au début, lorsqu’elle avait passé la porte. Mais non, elle avait décidé de s’ouvrir, de piler sur sa fierté au risque d’être blessée en retour. Maintenant, Mathias n’avait plus le choix. Il ne pouvait pas l’insulter ou même l’ignorer. Pas après ça... Alors le Préfet-en-Chef capitula. Il acquiesça, brièvement, d’un demi hochement de tête presque imperceptible. Ce n’était pas un pardon entier, parce qu’il y avait encore des choses à régler, mais c’était un début... Un étonnamment bon début.

L’atmosphère bizarrement lourde devait autant déplaire à Olyssa qu’à Mathias (lui qui détestait être sérieux !), puisqu’elle enchaîna sur un trait d’humour. Avant cette réunion forcée, le Serpentard s’était juré de rester froid et distant... Toutefois, les choses avaient évoluées. Probablement beaucoup plus même qu’il n’aurait pu l’imaginer. C’est donc en laissant son éternel demi-sourire récupérer sa place que le Préfet-en-Chef accueillit la remarque de son interlocutrice.

L’ambiance n’était pas encore comme avant. Une certaine gêne persistait. À cause de ce qu’Olyssa avait plus ou moins révélé et aussi parce qu’un an et demi s’était écoulé. Cependant, pour ce dernier point, il n’y avait que le temps qui pourrait arranger les choses. Chacun de leur côté, Olyssa et Mathias avaient changés. Le jeune Adams s’en rendait compte en observant la Gryffondor. Ce n’était pas que physique. Son tempérament n’était pas le même... Est-ce que c’était de la maturité ? Quoiqu’il en soit, il était persuadé qu’avant, jamais elle n’aurait été aussi honnêtement expressive. Ce n’était peut-être pas la seule nouveauté... Il leurs faudrait le temps de se redécouvrir.

"Le riche et puissant Mathias Adams aime s’accorder des pauses entre deux conquêtes..." , rétorqua moqueusement le Vert et Argent, sans méchanceté toutefois.

Et voilà ! Olyssa avait encore gagné. Il n’avait pas su lui tenir tête. Et le pire, c’était que, pour l’instant, il s’en fichait éperdument. Il aurait dû lui garder rancune plus longtemps, mais... elle s’était excusée, non ? Qu’est-ce qu’il était faible quand même... Il n’avait même pas agit de la sorte avec Norbert qui était pourtant son ami depuis bien plus longtemps que la jeune Nymfalis... (D'ailleurs, en parlant du Préfet, il n'allait probablement pas sauter de joie en apprenant le retour de la Préfète-en-Chef...)

"Alors, puisqu’on est dans les révélations chocs, sache pour la prochaine fois que je considère comme franchement impoli de ne pas dire aurevoir." , poursuivit Mathias, sérieux sans en avoir l’air.

[ Lol, je ne te promets rien non plus en semaine Mah là pour moi c'est jour férié demain, alors j'en profite! ]

La jeune Nymfalis, comme on aurait pu s’y attendre, s’était empressée de détourner la conversation après avoir proféré ses excuses, si précieuses par leur rareté. A cet hésitant " je suis désolée ", l’adolescente remarqua quand même l’expression de surprise qui passa sur les traits du Serpentard, avant qu’il lui adresse un imperceptible hochement de tête. Mathias n’était pas plus doué pour pardonner qu’elle l’était pour se repentir. Les deux jeunes sorciers possédaient décidément une fierté qui mériterait d’être douchée tant elle était excessive. Néanmoins, Oly sentit un poids énorme s’envoler de ses épaules lorsque l’héritier Adams lui accorda cette réaction, tout à fait rarissime de sa part. Il semblait la pardonner, du moins prêt à essayer de la pardonner. Un bref et discret sourire apparut à nouveau sur les lèvres de la Gryffondor. Comment expliquer qu’un garçon puisse avoir tant d’influence sur son moral ? Comment se faisait-il que ce garçon en question était son indéniable contraire, de surcroît à Serpentard ? Oly ne comprendrait décidément jamais l’attirance incontrôlable qu’elle ressentait pour le jeune Adams…

Ce dernier semblait à présent perdu en pleine réflexion, sûrement assailli par le doute. Olyssa songea avec appréhension qu’il devait être entrain de se demander comment réagir : agirait-il en confirmant son hochement de tête à l’apparence réconciliatrice ou finalement en le contredisant et en reformant ses défenses ? Sa réponse sur son absence de nouvelles pendant l’année précédente paraissait également le préoccuper. La croirait-il ? Serait-il vexé de l’opinion qu’elle pensait qu’il avait d’elle ? En déduirait-il qu’il avait peu d’importance pour elle et que cette raison avait déterminé son attitude ? Serait-il vexé qu’Oly ait parlé de son départ à Kali mais en l’omettant lui, comme tous les autres ? Non, cette dernière déduction était peu vraisemblable. Le Serpentard savait évidemment que la jeune Horuni était sa meilleure amie, et si les rapports des deux Serpentards étaient on ne peut plus houleux – Surtout depuis que Fenrir s’était entiché de Kalinah et inversement, ce qu’Oly n’accueillait pas non plus avec un enthousiasme débordant - il ne pouvait tout de même pas lui reprocher ça. En bref, la Rouge et Or mentait souvent, et elle espérait malgré tout que lorsque la sincérité résonnait dans sa voix, ses interlocuteurs la saisissaient.

« Le riche et puissant Mathias Adams aime s’accorder des pauses entre deux conquêtes... » Répondit soudain le Préfet-en-Chef d’un air de provocation amusée. Oly ne put s’empêcher de rire. Cette voix, ces intonations narquoises et arrogantes si particulières lui avaient terriblement manqué. Peut-être était-ce parce que seul Mathias parvenait à la faire sourire avec un humour si sarcastique – mis à part la jeune Horuni – et qui démontrait directement la valeur qu'il s’auto-accordait. Aussi étrange que cela puisse paraître, cette attitude typiquement serpentardesque n’avait qu’un effet sur la jeune Nymfalis lorsqu’elle était utilisée par le Vert et Argent : un attendrissement imprévisible.

« Lorsqu'on a autant de groupies que toi, j’imagine que c’est indispensable. Ce serait impensable que tu n'excelles plus dans la domaine de la séduction…» Répliqua la Gryffondor d’un ton si sérieux que son ironie était tout de suite repérable, un semblant de sourire moqueur posé sur les lèvres, le regard amusé. Les deux Préfets-en-Chef de Poudlard avaient toujours pratiqué entre eux cet humour basé sur la provocation. Enfin…Lorsqu’ils n’étaient pas occupés à se hurler dessus, s’évertuant à se blesser verbalement.

La jeune sorcière se sentait de plus en plus à l’aise. Elle étendit définitivement ses jambes par-dessus l’accoudoir de son fauteuil. Ses vêtements commençaient à sécher, et elle songea avec une légère amertume qu’elle aurait peut-être pu pratiquer un sortilège pour précipiter les choses. Malheureusement, la Gryffondor possédait une capacité très médiocre dans le domaine ménager de la magie, malgré tous les efforts qu’avait pu faire sa mère depuis son entrée à Poudlard pour lui enseigner, disait-elle, " les secrets d’une femme exemplaire "…Et puis quoi encore ? Oly se remémora furtivement cette matinée où sa mère s'obstinait encore à ce sujet, et où elle n'avait rien trouvé de mieux à répondre que le jour où elle serait une femme exemplaire, Tu-Sais-Qui serait de retour. La jeune fille ne perdit bien entendu pas de temps pour déguerpir par la suite…Sa mère la poursuivit environ une heure en hurlant avec une casserole à la main, les jumeaux scandant le nom du mage noir sur le ton de " petit papa Noël " au plus grand désespoir de celle-ci. Ces femmes traditionnelles décidément…Aucun humour ! Bref, peut-être que les cours de sa mère en la matière pouvaient finalement avoir une utilité.

« Alors, puisqu’on est dans les révélations chocs, sache pour la prochaine fois que je considère comme franchement impoli de ne pas dire aurevoir. » Reprit l’héritier Adams d’un sérieux franchement discutable.
« Nan mais dans quel monde vit-on…Mathias Adams qui me fait une leçon sur la politesse. Tu as d’autres changements de personnalité surprenants à m’apprendre ? » Se moqua gentiment la Gryffondor avant d’ajouter plus sérieusement :
« Si je dois redisparaître pour un an, cette fois je t’assure que je n’oublierai pas de te dire aurevoir. »

Le fait de prononcer la durée de son année à l’étranger, le fait de se retrouver avec un Mathias beaucoup moins rancunier que dans ses souvenirs, refit brusquement redescendre sur terre la Préfète-en-Chef de la maison des Lions. Qu’était devenu Mathias ? Y avait-il eu des modifications notables dans sa vie, dans celle de ses amis ? Elle s’interrogeait aussi sur la tournure qu’avait pris la relation Fenrir/Horuni depuis qu’elle avait vu avec quelle intensité ils se dévoraient du regard, la veille au bal d’Halloween. Kali et elle n’ayant pas eu l’occasion de se ré-adresser la parole depuis ce moment-là et ayant omis de se renseigner, elle se promit de demander à Mathias où en étaient leurs meilleurs amis respectifs. Faisant preuve d’une franchise et d’une imprévisibilité toujours aussi tenaces, la Gryffondor reprit donc la parole :

« Je viens de me rendre compte que je ne t’avais toujours pas demandé comment tu allais…Tu as raison, je commets vraiment des impairs dans la politesse…Je ne t’avais pas dit que les français étaient terriblement mal élevés ? » Termina Oly avec un regard pétillant. Elle éprouvait un plaisir inconcevable à se plonger dans le regard obscure, si calculateur et mystérieux du jeune Adams, à se réadapter au timbre de sa voix si provocateur, si plaisant. Olyssa Nymfalis ne s’était pas sentie aussi heureuse depuis longtemps…

Lorsqu’Olyssa parla de groupies, Mathias ne pu s’empêcher de se demander si elle s’incluait dans le lot. Heureusement, elle ne correspondait pas aux fans types. Il y avait celles qui se tenaient en retrait, qu’on ne remarquait pas parce qu’on avait aucune chance de le faire, et celles détestables qui faisaient tout le contraire, voulant se mettre de l’avant à tout prix. Mais Olyssa ne correspondait à aucune de ces deux caricatures. Elle avait le mérite de ne pas classer sa vie amoureuse comme priorité absolue. Ils étaient juste amis... et plus si affinités ? C’était une façon de voir la Préfète-en-Chef à laquelle le Serpentard n’avait jamais songé, parce qu’il ne s’était jamais demandé ce qu’elle pouvait bien penser de lui. Jamais avant aujourd’hui où il n’avait même pas eu besoin de réfléchir pour comprendre ce que la Gryffondor ressentait. Maintenant, il avait l’impression d’entendre dans chacune de ses paroles quelque chose de différent. C’était perturbant...

La Rouge et Or semblait remise de son manque de confiance passager. Elle avait retrouvé le sourire (un sourire provocateur, mais un sourire tout de même) et s’était avachie dans le fauteuil qu’elle occupait. Mathias s’en sentit un peu vexé... Il aurait quand même aimé que son interlocutrice se repente un peu plus longtemps. Hey, elle lui devait plus d’un an d’excuses ! Quoiqu’il était vrai que cette attitude lui ressemblait plus que celle d’une fille éplorée. L’air fier, le regard espiègle, elle était tout simplement adorable. Avec ce genre de pensées, on aurait pu se demander quelle était vraiment la portée des sentiments de Mathias à l’égard de la jeune Nymfalis, mais l’héritier Adams, peu enclin à l’introspection, n’avait pas l’intention de faire le point. Surtout pas après un an et demi de distance entre eux. Il était prêt à pardonner, mais il lui était impossible de redonner sa confiance aussi facilement, même si ça avait l’air mélodramatique dit comme ça. Alors il s’efforça de chasser de son esprit l’idée d’une Olyssa amoureuse de lui et de ne la voir que comme il la voyait avant : une amie.

Heureusement, c’était apparemment l’objectif qu’avait également la Préfète-en-Chef. Elle ne refit pas la moindre allusion à un quelconque penchant émotif et les deux adolescents têtus comme des ânes purent croire que rien n’avait changé.

Poursuivant sur le chemin de la taquinerie (route qu’empruntait neuf fois sur dix les deux cinquièmes années), Olyssa tourna en dérision la ‘leçon de politesse’ de son homologue, ce à quoi Mathias se contenta de sourire sans rien répondre. Ce n’était pas parce qu’il se fichait généralement des politesses qu’il ne les connaissait pas ! Il venait d’une famille de fiers Sang-Purs ce qui, par définition, l’avait forcé à des leçons de bienséance depuis qu’il était en âge de comprendre. Il savait manger avec quinze couverts différents, valser, faire la révérence et il vouvoyait même ses parents en public... Normal qu’il profite des libertés offertes à Poudlard, non ?

"J’espère bien ! D’ailleurs, pour te faire pardonner, tu devrais faire quelque chose pour moi, tu ne crois pas ? Ça tombe bien, j’ai des devoirs en retard..." , tenta le Serpentard lorsqu’Olyssa s’excusa de nouveau, moins directement que la première fois cependant. Même s’il ne le montra pas, il lui en fut reconnaissant. Elle aurait pu s’excuser encore 546 fois [Le nombre de jours dans un an et demi, moins deux. ], la jouissive saveur de ces mots n’aurait fort probablement pas tarie.

Il n’était évidemment pas sérieux. Ce n’était pas son genre de faire faire ses devoirs par quelqu’un d’autre... surtout un représentant d’une autre Maison en plus. Des plans pour qu’elle lui fasse perde des points exprès ! D’ailleurs, en y songeant, à quoi ressemblait l’organisation scolaire à Beauxbâtons ? En excluant tout le côté cours et travaux, à quoi avait ressemblé la vie d’Olyssa là-bas, en France ? Elle y était resté pendant toute sa quatrième année... Elle s’était sûrement fait d’autres amis. Des petits amis aussi ? C’était une idée qui, on s’en doute, était inexplicablement loin de plaire au Serpentard. Sa curiosité n’en était que plus exacerbée, mais si la Préfète-en-Chef avait été capable de faire preuve de maturité un peu plus tôt, ce n’était pas encore dans les cordes du jeune Adams. Il ne voulait pas avoir l’air de s’être inquiété et qu’elle aille s’imaginer des choses... Il était plus indépendant que ça, quand même !

Olyssa ne semblait toutefois pas sur le point de se lancer dans un grand récit relatant combien sa vie avait été merveilleuse pendant les derniers mois. (Un exposé racontant l’inverse aurait sûrement été beaucoup plus satisfaisant, tout à fait objectivement parlant, comme on peut s’en douter...) Elle se cantonna plutôt dans la prévisible imprévisibilité des Lions et délaissa à nouveau le thème des excuses pour s’intéresser à son confrère.

Il n’y avait bien qu’Olyssa Nymfalis pour agir ainsi. Un instant elle semblait sur le point d’annoncer un décès, l’instant d’après elle avait retrouvé toute sa forme, prête à blaguer et à s’amuser. Elle était merveilleusement énergique, sans être aussi girouette que Kanha O’Flaherty, précisons le. (La Serpentard, elle, battait tous les records et ça n’avait rien d’enviable.) Bref, s’il y avait des choses qui avaient été modifiées en 18 mois, ce n’était pas le cas de la vitalité de la Préfète-en-Chef. Un point rassurant. Peut-être qu’il ne s’était pas passé tant de trucs que cela, qu’ils réussiraient à reprendre sans difficulté leur amitié là où elle s’était interrompue...

"Je ne suis jamais aller en France, mais je n’ai aucun mal à te croire." , répondit le Préfet-en-Chef, confirmant sans gêne les dires de la jolie blonde quant à ses impairs d’éducation. Elle lui avait tendu la perche ; il l’avait saisie !

C’était ainsi entre eux. En aucun cas un sujet ne pouvait rester posé plus de deux phrases en ligne... D’un autre côté, Mathias, esclave de son orgueil, était ainsi avec tout le monde. Olyssa faisait un peu pareil, sauf qu’elle avait tendance à placer, souvent sans en avoir l’air, des questions sérieuses. ‘Comment tu vas ?’ en était une. Soit elle espérait une vraie réponse (comme les filles en général lorsqu’elles posent des questions de ce type), soit elle cherchait seulement à meubler la conversation. De toute façon, peu importe la raison, elle connaissait mal Mathias si elle espérait obtenir autre chose qu’une vanne.

"Remarque, je ne te l’ai pas demandé non plus... Et tout le monde sait que je suis l’exemple à suivre en matière de politesses." Tadam. Comment répondre sans répondre, par Mathias Adams. Puisqu’il n’avait pas envie qu’elle insiste avec ce genre de questions, le Serpentard, sans se départir de son air amusé, enchaîna presque immédiatement avec une plaisanterie : "Tu en as d’autres des questions faciles ?"

Olyssa Nymfalis tendit ses mains vers le feu par-dessus l’accoudoir de son fauteuil. Comme le laissait comprendre son attitude, la jeune sorcière était à présent totalement détendue. Ce changement soudain d’humeur était étrange sachant que quelques minutes plutôt elle était sur la défensive, prête à toute éventualité venant du Préfet-en-Chef. Mais celui-ci semblait avoir déclaré plus ou moins la paix, ou du moins une trêve, et ce moment de répit dans les conflits incessants que vivait Olyssa depuis quelques jours était accueilli avec un soulagement non dissimulé. Oly avait certes, toujours éprouvé une grande affection pour les histoires conflictuelles, mais lorsqu’elles concernaient des personnes qui comptaient un minimum pour elle, ces histoires perdaient aussitôt de leur charme pour se transformer en torture, comme devait le ressentir toute personne normalement constituée.

La Gryffondor se redressa sur son dossier à la réponse du jeune Adams, son regard pétillant reflétant ses pensées : depuis l’instant de bonheur qu’elle avait ressenti en passant le portail de Poudlard, elle ne s’était plus jamais sentie aussi bien dans le château. Vu la tournure que prenaient les évènements, elle s’était même demandée s’il n’aurait pas été préférable pour elle de rester à Beauxbâtons jusqu’à la fin de ses études en sorcellerie. Mais cette nouvelle bouffée d’un air, semblait-il un peu plus pur, démontrait le contraire…Enfin, une part d’elle restait tout de même sur ses gardes : sachant qu’Oly possédait un caractère si méfiant qu’il dérivait parfois vers la paranoïa, il aurait était étonnant qu’elle oublie toute prudence, geste qu’elle n’accomplissait pour ainsi dire jamais. Le Serpentard, quant à lui, faisait autrefois preuve d’une susceptibilité qui avait le don de rendre certaines situations invivables, et son homologue féminin se promettait pour une fois de ménager ce défaut, en espérant que son manque de diplomatie habituel ne vienne pas détruire cette promesse. La Gryffondor et le Serpentard devaient décidément jouer sur les compromis pour s’entendre…Mais après tout, leurs maisons n’étaient-elles pas sensées les opposer en tous points ?

« J’espère bien ! D’ailleurs, pour te faire pardonner, tu devrais faire quelque chose pour moi, tu ne crois pas ? Ça tombe bien, j’ai des devoirs en retard... »

L’un des sourcils de la Préfète-en-Chef se haussa, son visage prit une expression narquoise très proche de celles qu’adoptait souvent la jeune Horuni.
« Ton humour n’a pas perdu de sa brillance dis-moi. J’imagine qu’il n’y a pas de conditions à la réalisation de tes souhaits ? …Dans ce cas, donner tes devoirs à un jeune Poufsouffle en prétextant une punission serait…Une solution satisfaisante » proposa avec une bienveillance exagérée la Gryffondor. Donner le devoir d’un Serpentard de cinquième année à un cadet assurait déjà une mauvaise note. Mais lorsqu’on connaissait l’aversion des Poufsouffles pour les Serpentards, cette expérience relevait carrément de la stupidité.
« Quelques points en moins ne seraient pas de trop, j’ai remarqué que votre sablier avait une certaine avance sur le nôtre cette année » Rajouta la Gryffondor d’un air faussement pensif.

Elle adressa un grand sourire provocateur au Serpentard, se délectant de ce jeu hypocrite qui lui avait tant manqué et de la réhabilitation de ses pouvoirs. Le fait qu’elle allait pouvoir à nouveau retirer des points à des Serpentards était assez jouissif. Elle n’avait que très rarement à trouver des excuses inventées pour éloigner la Coupe des Quatres Maisons des serpents. Ceux-ci se chargeaient généralement tous seuls de se rendre coupables en se battant et insultant d’autres élèves en plein milieu des couloirs, ce qui rendait la tâche étonnamment facile à la jeune fille et lui évitait d’être excessivement malhonnête. Bon, il fallait avouer qu’elle n’était pas non plus toujours très juste, c'était le rôle des Poufsouffles ça. Un Serpentard restait un Serpentard, et elle savait pertinemment que les Préfets Adams et Fenrir ne se servaient pas du tout de leurs pouvoirs de façon légale. Elle s’était d’ailleurs toujours demandé comment avaient-ils pu obtenir les grades de Préfet et Préfet-en-Chef…Sûrement parce qu’ils étaient les représentants types de leur maison : fourbes, ambitieux, sans aucune moralité, remplis de préjugés. Tout ce qu’elle était sensée haïr du plus profond de son être…C’était le cas, à deux exceptions près, dont une un peu plus ennuyeuse pour elle que sa meilleure amie : Mathias.

« Je ne suis jamais aller en France, mais je n’ai aucun mal à te croire. » Répondit le Serpentard à la raillerie de la jeune fille sur l’éducation des Français. Celle-ci se contenta d’une simple moue amusée. Mathias avait toujours pris un malin plaisir à enfoncer le clou dans ce genre de situation, et paraissait à l’instant assez fier de la tournure qu’il avait fait prendre à l’honorable phrase de la Gryffondor, tout d’abord formulée pour paraître agréable, mais également pour obtenir des informations sur la vie du Serpentard depuis son départ d’Angleterre. Certes, Oly ne s’attendait pas à un grand développement. Mathias aimait les réponses courtes et s’arrangeait toujours pour qu’elles le soient plus encore dès que cela concernait sa vie privée. Son talent dans le domaine du " détournement de sujet " Oly le considérait depuis longtemps comme une sorte d’arme qu’il utilisait tout simplement pour se protéger des inquisiteurs et se faire respecter. Depuis quand des adolescents cruels et en quête de grandeur étaient impressionnés par un jeune homme qui dévoilait tous ses sentiments et son histoire ? Pour certains, ce genre d’attitude était un truc de filles, pour d’autres comme Olyssa, c’était un truc de faibles, une tendance typiquement Lempinienne qu’elle n’adopterait jamais. Mina Lempin aurait du songer à ceci il y a bien longtemps, Oly était certaine que cela lui aurait évité nombreuses de ses mésententes et mésaventures avec les Serpentards ou elle-même, en l’occurrence.

« Remarque, je ne te l’ai pas demandé non plus... Et tout le monde sait que je suis l’exemple à suivre en matière de politesses…Tu en as d’autres des questions faciles ? » Termina le jeune Adams, un air amusé peint sur le visage, le sujet ayant été évité comme prévu, et ce qui ne fit qu’attendrir la Gryffondor. Elle songea avec effarement que ses aversions sur le cas Lempin semblaient se concrétiser directement en elle depuis le début de sa conversation avec le Préfet-en-Chef. Une reprise de soi-même s’imposait ! Mais Oly n’arrivait pas à sortir de l’océan de noirceur et de mystères des yeux ténébreux du Serpentard, aussi bien qu’elle ne parvenait pas à se détourner de son sourire charmeur. Heureusement pour elle, la Gryffondor faisait partie de ces personnes qui possédaient un certain talent à dissimuler leurs sentiments et émotions, mis à part lorsque la colère l’emportait sur la raison. Sur un unique point, les deux Préfets-en-Chef de Poudlard se ressemblaient : ils haïssaient montrer ce qu’ils ressentaient et cultivaient le secret.

Olyssa se contenta donc d’un sourire énigmatique en contradiction complète avec les sentiments et idées peu recommandables auxquelles elle avait pu songer précédemment en guise de réponse. Elle s’était déjà révélée jalouse au bout de trente secondes en la présence de Mathias, cet égarement était plus que suffisant. Elle redoutait à vrai dire plus que tout que Mathias puisse confirmer les doutes qu’ils devaient forcément avoir à présent sur son compte, et surtout qu’il l’assimile à la demi-douzaine de prétendantes pathétiquement dévouées et ternes qui semblaient l’entourer. Elle préférait de loin qu’ils restent en des termes amicaux jusqu’à la fin de ses jours qu’en venir à ça. De toute manière, elle ne voyait pas comment la situation pourrait réussir à virer autrement, et elle était à vrai dire bien décidée à la maintenir ainsi plutôt que de prendre des risques contre sa précieuse fierté.

« Tout le monde ? Je dois être alors l’unique personne à avoir longtemps cru que tu n’étais qu’une brute, toujours occupée à malmener, insulter et manipuler avec Fenrir et Lizak » Répondit la Gryffondor, on ne peut plus railleuse mais s’appuyant bel et bien sur la réalité.
« Evidemment que j’ai d’autres questions » Déclara-t-elle d’un air nonchalant, se demandant si le jeune Adams allait cette fois-ci les trouver à son goût.
« Comme tu as du le comprendre, Kali et moi…Ce n’est plus ce que c’était. Et ceci par ma faute. N’hésite pas à l’annoncer à Fenrir d’ailleurs, il en éprouvera sans doute une grande satisfaction. Je me demandais donc si tu pouvais…me renseigner. » Oly laissa s’étendre une triplée de secondes avant de formuler enfin sa demande, doutant fortement de la volonté du Serpentard à lui répondre correctement. En même temps, en lui répondant, il lui éviterait une longue procédure d’épiage et pouvait ainsi lui confirmer l'impression qu'elle avait eu la veille au Bal d'Halloween. Et puis, qu’y avait-il de mal à se soucier de celle qu' elle considérait toujours comme sa sœur, ceci malgré leur éloignement ?
Oly n'ignorait pas que Mathias n'aimait pas Kali, tout comme elle n'aimait pas Norbert. Mais leurs meilleurs amis respectifs en avaient décidé autrement quant à leurs attirances. Mathias avait été présent l'année précente, et, sûrement préoccupé par l'aspiration, déjà de plus en plus évidente en fin de troisième année, de Fenrir à conquérir le coeur de la jeune et belle Horuni, il avait du se tenir parfaitement au courant de l'évolution de cette relation. Olyssa savait qu'elle aurait en tout cas agi de cette manière.
« Cela a-t-il avancé entre Fenrir et Kali ? »

[ - HJ - Voilà, avec toutes mes excuses pour ces 3 semaines de retard, j'éviterai d'en revenir à une telle durée =/ De toute...Les vacances dans deux semaines en France =)) ]

Olyssa, toujours confortablement installée, se rapprocha légèrement du feu, en quête de chaleur. Ses vêtements étaient encore détrempés et nul doute que la proximité des flammes n’était pas suffisante pour réchauffer entièrement l’adolescente. Il lui aurait fallu changer de vêtements ou, au moins, sécher ceux-là... D’ailleurs, pourquoi ne le faisait-elle pas ? Mathias aurait bien jeté le sort à sa place, mais ce n’était pas une bonne idée, à moins que la Préfète-en-Chef ne craigne pas d’être incinérée vivante. S’il y avait bien une chose dans laquelle l’héritier Adams était vraiment nul, c’était bien les sortilèges domestiques. Pourquoi les apprendre de toute façon ? Les Elfes de Maison se chargeaient de toutes ces tâches emmerdantes... Peut-être que la Gryffondor pensait comme lui. Mathias savait qu’elle ne venait pas d’une famille riche, mais les Nymfalis pouvaient quand même avoir un Elfe. En tout cas, si c’était le cas, ils faisaient une belle paire ! Tous les deux incapables d’utiliser un simple sort de séchage...

Mathias, quant à lui, était toujours debout, les bras croisés. Il ne s’était pas déplacé depuis l’arrivée d’Olyssa, mais ne s’en rendait compte que maintenant. Devait-il faire comme la Rouge et Or et prendre un fauteuil ? C’était un peu inutile ; il n’avait pas prévu de rester. L’idée de passer à autre chose l’attirait, mais ce n’était pas possible pour l’instant. Pas cet après-midi là en tout cas... Quelque part, il était toujours sur la défensive, la rancoeur qu’il ressentait contre sa consoeur n’étant pas entièrement dissipé. Elle s’était excusée, oui. Il lui avait implicitement pardonnée, certes. Pourtant, il ne parviendrait à tourner réellement la page que la prochaine fois qu’il la verrait, quand les réconciliations seraient du passé. La, c’était... gênant ? Enfin, il n’était pas entièrement à l’aise quoi. Alors, pourquoi rester ?

La Préfète-en-Chef paraissait, au contraire, parfaitement contentée par la situation. Une qualité admirable, soit dit en passant, mais qui n’était définitivement pas dans les cordes de l’héritier Adams. Comment faisait-elle pour passer ainsi d’une humeur à l’autre ? Ça le dépassait... et ça le fascinait en même temps. Perdu dans ses pensées, Mathias observa son interlocutrice sans vraiment écouter la réponse qu’elle lui donna. Elle parla de Poufsouffle et des Sabliers... Mais le Serpentard ne fit que lui sourire à demi, détaillant silencieusement les expressions de la blonde. Ses prunelles cerclées de turquoise brillaient malicieusement tandis qu’elle répondait avec une amicale provocation aux sarcasmes de son homologue masculin. Le feu de l’âtre se reflétait sur les gouttelettes d’eau encore accrochées à la Gryffondor, les faisant luire comme une fine poussière magique...

Ce serait étrange de recroiser Olyssa après plus d’un an sans la voir... Maintenant qu’ils allaient à nouveau être deux Préfets-en-Chef, elle allait s’amuser à le contredire... D’amusantes heures de prises de bec en perspective. Ça allait sûrement faire plaisir aux Préfets. Sauf Norbert... Haypèn, par exemple, serait jubilant. Lui qui s’était toujours détestablement bien entendu avec la jeune Nymfalis...

Une brute manipulatrice, hein ? Ne se sentant pas insulté le moins du monde, Mathias laissa s’agrandir son sourire et ne chercha en rien à détromper son interlocutrice. Il nota toutefois plus spécialement une expression particulière : ‘à avoir longtemps cru que tu n’étais’... Vraiment ? Alors, comment le considérait-elle maintenant ? Olyssa ne s’y attarda malheureusement pas. Ce n’était qu’une taquinerie et, déjà, elle ramenait la conversation à d’autres considérations. Le sujet redevint sérieux... Enfin, il n’en avait pas l’air quand on se fiait au ton et à l’attitude nonchalante de la Préfète-en-Chef, mais Mathias savait qu’il en était autrement. Olyssa et Kalinah étaient meilleures amies depuis... depuis 4 ans au moins. La Gryffondor avait beau avoir un très fort caractère, si le lien qu’elle avait avec la Capitaine de Quidditch de Serpentard battait de l’aile, il était évident que ça la touchait. Encore les conséquences de son envie de couper les ponts avec Poudlard ?

*Mais qu’est-ce que tu espérais ?* , ne pu s’empêcher de penser hargneusement Mathias. Il se retint toutefois de le laisser transparaître. Elle s’était excusée...

Malgré tout, il était intrigué... Sur quoi Olyssa voulait-elle être renseignée ? Il ne connaissait rien de la vie personnelle de sa consoeur de Maison. La Gryffondor devait le savoir ou au moins s’en douter fortement. Mis à part si elle voulait savoir si Kalinah était toujours en vie, il ne pourrait pas lui apprendre grand chose...

Norbert et Horuni !? Elle voulait connaître les derniers potins de Poudlard ? Sur le coup, le Préfet-en-Chef fronça les sourcils, surpris. Et puis il se reprit... Elle ne voulait pas tous les potins de Poudlard, juste ce qui concernait son (ancienne ?) meilleure amie... Heureusement d’ailleurs, parce que sinon il se serait senti insulté. Il était loin d’être l’une de ces greluches dont la bible s’appelait Sorcière Hebdo ! Sauf que, même si Olyssa s’interrogeait sur un sujet dont l’héritier Adams était plus ou moins parfaitement au courant, il n’allait rien dire. Il s’agissait peut-être de Kalinah, mais également de son meilleur ami à lui, Norbert Fenrir. Il aurait été quel genre d’ami s’il s’était amusé à jacasser dans le dos du Préfet ? Si Olyssa voulait savoir quelque chose, elle devrait le demander à Horuni... ou Norbert, mais ça elle ne le ferait jamais.

"Être la dernière à tout savoir... c’est l’un des désavantages d’avoir été absente." , remarqua doctement Mathias avec humour. "C’est plutôt à une fille que tu devrais t’adresser pour un résumé des commérages du moment." , ajouta-t-il, un brin plus sérieux, pour signifier implicitement qu’elle ne tirerait rien de lui.

Et pourtant, Merlin sait qu’il en aurait eu long à dire ! D’abord la déclaration de Norbert à Kalinah, qu’il avait involontairement surpris... Il s’était brouillé avec le jeune Fenrir à ce moment là. Ce n’était pas vraiment longtemps avant qu’Olyssa ne parte pour Beauxbâtons... Bref, il aurait pu lui décrire dans les moindres détails comment ça s’était passé ! Évidemment, il était loin d’être un observateur extérieur et impartial, donc son récit risquait d’en pâtir, mais bon... Ensuite, pendant un moment, Norbert (un magnifique ecchymose autour de son oeil droit) avait évité Kalinah, de ce que Mathias en savait. Il n’avait pas trop d’informations sur cette partie... Au printemps, il s’était réconcilié avec Norbert et avait pu constater que la vie amoureuse du Préfet était tortueuse. Difficile de savoir s’il sortait avec Kalinah ou non... mais ils n’arrêtaient pas de se dévorer du regard ! Un véritable enfer pour Mathias qui était si découragé par la situation qu’il en devenait agressif quand il voyait les deux tourtereaux se tourner autour.

Et puis Mathias bougea enfin de là où il était. Tout en s’avançant résolument, comme si cela faisait un très long moment qu’il se retenait de le faire, vers le fauteuil qu’occupait Olyssa, il détacha sa cape au blason de Serpentard. Non, il n’allait pas sauter sur la Gryffondor... Il retira juste, avec détermination, sa cape pour la lancer à la jolie blonde.

"J’ai presque froid à ta place... Rentre à ta tour avant d’attraper la crève." , la congédia-t-il, à peu près galamment. Il lui souriait toujours, d’un sourire peut-être ironique, mais peut-être protecteur... Son regard en tout cas s’était fait plus doux qu’à l’ordinaire.

Sans laisser le temps à la Préfète-en-Chef de protester, Mathias, désormais en chemise et en jeans, se dirigea vers la porte restée entrouverte de la Salle des Préfets. Il l’ouvrit en grand, avec facilité maintenant que les Elfes de Maison avaient enfin huilé ses gonds usés. Il se retourna ensuite, en parfait maître de la situation, vers Olyssa. Il avait décidé que la réunion était terminée. Et maintenant, il pourrait réfléchir tranquillement à tout ça dans son dortoir...

La jeune Nymfalis songeait avec satisfaction qu’elle se conduisait plutôt bien. Enfin, depuis que les premières cinq minutes orageuses de l’entretien des Préfets-en-Chef étaient passées. Elle avait opté pour une attitude tout à fait amicale. Cela dû, tout d’abord, à son éclat de jalousie précédent, mais également à la gêne qu’elle ressentait envers Mathias pour l’avoir laissé durant un an, tout comme Kali, sans nouvelles. Une apparence détendue, un visage souriant, un regard pétillant…Rien de mieux selon elle pour dissimuler ses sentiments. Or, grâce au silence du jeune Adams, la Gryffondor, naturellement observatrice, constata que cela faisait bien un quart d’heure qu’elle n’essayait plus de déchiffrer les pensées et émotions du Serpentard, tout en admettant qu’il en ait et qu’elles soient déchiffrables.

Olyssa profita donc de ce moment de répit pour observer le Batteur des Vert et Argent, entreprise assez ardue, sachant que celui-ci était un professionnel pour ne rien laisser paraître. Le regard sombre du jeune Adams n’était néanmoins pas trompeur. Il brillait…D’une certaine colère, ou plutôt de rancœur. Oly cacha difficilement son désespoir derrière une mèche de cheveux mouillés. Que devait-elle faire pour qu’il la pardonne ? Elle avait répété des excuses à plusieurs reprises, elle avait tenté d’expliquer les raisons de ses erreurs, elle avait essayé de lui rappeler, en le provocant gentiment, les moments qu’ils avaient passés ensemble à se chamailler, et dont elle espérait qu’il gardait de bons souvenirs. A nouveau, la jeune sorcière semblait prise au dépourvu. Kali et Mathias ne lui excuseraient-ils jamais son écart de l’année précédente ? Pensant avec une lueur d’espoir qu’elle se trompait peut-être concernant ses interprétations du ressentiment du Serpentard, elle se rassainit. Après tout, elle doutait que l’importance qu’elle ait pour Mathias soit assez importante pour qu’il lui en veuille considérément. Elle aurait pourtant bien aimé que ça soit le cas…

« Être la dernière à tout savoir... c’est l’un des désavantages d’avoir été absente » Finit par prononcer le Préfet-en-Chef des Serpents sur le ton de la plaisanterie…Ce qui ne fit pas sourire Oly, ou lui arracha plutôt un semblant de sourire crispé. Elle n’entendit pas la seconde phrase sur laquelle il enchaîna.
Croyait-il vraiment qu’elle avait été heureuse de devoir tout abandonner ? De prendre la décision de ne plus écrire à sa meilleure amie ? Certes, elle n’aurait jamais pensé à écrire au Serpentard pour les raisons précédemment citées. Elle n’avait pas pensé qu’il aurait pu en éprouver le désir. Mais le fait de couper totalement les ponts avec la jeune Horuni lui avait déchiré le cœur, avait intensifié sa culpabilité jour après jour jusqu’à ce qu’elle en arrive au point de proférer des excuses. Des excuses ! Mathias comprenait-il à quel point cet acte avait été humiliant pour elle ? Et ça ne lui suffisait toujours pas ? Etait-il obligé de blaguer sur un sujet qui était une torture pour elle ?

Olyssa, comme si elle était à la recherche d’un air un peu plus pur, tourna la tête à l’opposé de Mathias. Ne plus l’avoir dans son champ de vision sembla la calmer, et avec un retour de conscience, elle songea qu’à la place du Serpentard, elle non plus n’aurait pas pardonné aussi facilement. De ce point de vue, il était en réalité étonnant qu’il ait pris du temps pour parler avec elle et lui laisser une chance de se rattraper. Elle ne savait pas si elle aurait été capable du même effort…Sa colère s’évapora aussi brusquement et discrètement qu’elle s’était manifestée. Peut-être que ce qu’il fallait à Mathias, tout comme à Kali, c’était du temps…Une occasion d’endurcir sa patience après tout.

« Merci pour ta précieuse morale Mathias » Répliqua finalement la Gryffondor, une perceptible pointe d’ironie dans la voix. Olyssa aurait du se douter que le Serpentard ne voudrait de toute manière pas lui parler de la situation entre leurs meilleurs amis respectifs. Les Serpentards avaient toujours entretenu le secret, et malgré leur tendance à la traîtrise bien connue, Mathias et Fenrir faisaient exception à la règle entre eux. Oly considéra cependant cet aveu de fidélité du Préfet-en-Chef comme assez immature et décevant…Après tout, il s’agissait juste de lui confirmer que Kali et Fenrir sortaient ensemble ou non, et cette " révélation " ne pouvait pas être considérée comme une trahison vu qu’Olyssa le saurait tôt ou tard. Mais Mathias ne semblait pas vouloir l’avancer. Bref, en l’espace de deux minutes il avait commis deux fois plus d’impairs que durant tout le temps de leur réunion.
* Les mecs manquent vraiment de tact * songea avec exaspération la jeune fille.

Soudain, Mathias bougea. Bien sûr ce n’était pas un fait exceptionnel en soit, mais sachant que le Serpentard était resté immobile, debout à trois mètres d’elle, depuis le début de leur conversation, elle ne put s’empêcher d’être surprise, surtout lorsqu’elle constata que celui-ci s’approchait indéniablement d’elle.
« J’ai presque froid à ta place... Rentre à ta tour avant d’attraper la crève » Prononça-t-il en lui lançant sa cape. Outre le fait qu’elle se demandait depuis quelques minutes comment quitter la Salle des Préfets poliment et que Mathias venait de lui fournir une excuse, celui-ci venait d’accomplir un acte que l’on pouvait qualifier de galant, derrière le mot « crève » peu glamour. Oly haussa un sourcil, traduisant son étonnement. Elle savait que Mathias se conduisait souvent en gentleman lorsqu’il avait besoin de séduire et de manipuler des greluches, mais il n’avait jamais pratiqué ceci avec elle. Si lui aussi voulait partir, il lui suffisait de le formuler. La jeune Nymfalis ne croyait définitivement pas à l’air protecteur qui s’était affiché sur le visage du Serpentard. S’attendait-il à ce qu’elle le regarde avec adoration tout en obéissant à ses ordres ?

« Tu as raison, je dois y aller, j’ai une lettre à envoyer » Répondit-elle avec l’esprit de contradiction qui était le sien. Cela pouvait peut-être paraître bête, mais elle détestait, depuis sa petite enfance, obéir à tout ce qui se formulait à l’impératif, même lorsqu’il s’agissait d’un simple conseil.
Avec le minime espoir du doute, Oly adressa quand même un léger sourire reconnaissant au Serpentard, avant de sortir de la Salle des Préfets en passant devant lui.
Elle ne prit pas la peine de lui rendre sa cape. Après tout, c’était lui qui lui avait prêtée, et Oly ne faisait pas la différence entre prêter et donner, et puis un riche héritier tel que lui devait en avoir plus d’une dans sa valise.
Sur ces mots, la Gryffondor s’éloigna non pas vers la Tour des Gryffondors mais vers la Volière - elle n’avait aucun courrier à donner à sa chouette Mirska, mais autant jouer le jeu jusqu’au bout – Elle fit semblant d’ignorer combien Mathias était séduisant sans sa cape, qui, fort malheureusement, dissimulait d’habitude des épaules muscl…* Nan mais quoi encore ? Bientôt tu vas créer un fan club avec Yagher ? * se morigéna la cinquième année, avant de se demander si elle ne ferait pas mieux d’offrir cette foutue cape à la dite Yagher…Une Gryffondor avec une cape de Serpentard, ça promettait des commérages, mais elle était déjà trop loin pour la rendre à son propriétaire…Leur ronde habituelle dans les couloirs lui offrirait sûrement cette occasion le lendemain...

La température semblait avoir baissée sensiblement. À moins que ce ne fut que l’atmosphère qui était devenu soudainement plus lourd ? Olyssa s’était assombrie, sans que Mathias n’en comprenne la cause. Elle n’offrit à sa mauvaise blague qu’un sourire qui avait l’air forcé, presque douloureux. Et puis la Gryffondor détourna la tête, se perdant dans des pensées qui n’appartenaient qu’à elle. Lorsqu’elle desserra finalement les lèvres, le ton de sa voix était sans aucun doute ironique. Pourquoi ce nouveau changement d’humeur ? Mathias aurait bien aimé pouvoir entendre les pensées de la Préfète-en-Chef, juste une fois... Qu’avait-il manqué qui avait réduit à néant l’entrain de la blondinette ?

Le Préfet-en-Chef n’eut de toute façon pas le temps d’approfondir son questionnement. La jeune Nymfalis se leva, acceptant heureusement de suivre son conseil. Enfin, elle mentionna avoir une lettre à poster, mais Mathias trouvait l’excuse plutôt boiteuse. Si vraiment elle ‘devait y aller’, pourquoi avait-elle attendu qu’il la congédie ? Enfin, même si elle disait peut-être vrai, il espérait tout de même qu’elle mentait. La volière était le royaume des courants d’air. Elle ne pouvait pas, en toute connaissance de cause, s’y rendre avec des vêtements détrempés sur le dos ! Il lui avait prêté sa cape, d’accord, mais ça ne compensait pas entièrement...

Lorsqu’elle passa devant lui, Olyssa lui offrit un mince sourire que Mathias lui renvoya. Il n’était toutefois pas certain d’en comprendre la signification. Si elle était soudainement abattue et qu’elle lui souriait... était-ce pour le rassurer ? Idée ridicule. Il ne s’était pas montré inquiet, si ? Peut-être était-ce une dernière demande de pardon... Ou un remerciement muet pour la cape ? Ou bien il se cassait trop la tête et c’était juste un sourire d’au revoir...

Il regarda distraitement la cinquième année s’éloignée dans le corridor. Elle ne prenait pas sérieusement le chemin de la volière ? Et bien si ! Elle allait vraiment finir avec un rhume carabiné... Mathias songea un instant à la rattraper pour l’obliger à de plus sages décisions, mais il se reprit dans le même instant. À croire que les instincts mère-poule de sa mère déteignaient sur lui ! Il aurait eu l’air de quoi à être aussi attentif au bien-être de sa collègue ? Même s’il n’aurait jamais songé à faire ce genre de chose avec quelqu’un d’autre qu’elle... C’était encore pire ! Pourquoi se montrait-il protecteur envers Olyssa ? Elle était bien assez grande pour prendre ses décisions et vivre avec les effets secondaires de sa sinusite aiguë ! De toute façon, elle ne l’aurait pas écouté... Elle aurait haussé un sourcil provocateur, le mettant au défi de l’obliger à obéir... C’était qu’elle avait son caractère la Nymfalis ! Mais c’était comme ça qu’il l’aimait... Enfin, il l’aimait comme un ami, comprenons-nous bien, hein !

S’éloignant enfin de la Salle des Préfets, Mathias se dirigea vers les escaliers pour rejoindre le repaire des Serpentards et son dortoir. Il était évident qu’il pardonnerait à Olyssa. Il ne se voyait pas lui faire la tête indéfiniment. Elle s’était excusée... et avait promis de ne pas recommencer. Et puis, sa compagnie lui avait étrangement manqué... Il pouvait bien lui laisser une deuxième chance, non ? Dès qu’il la reverrait, cette histoire serait oubliée, il en était certain.

[C'est moins long que ce à quoi je t'ai habituée, mais c'est juste pour clore le topic.]