Rendez-vous nulle part [Terminé]

Sujet: Rendez-vous nulle part [Terminé] Mar 24 Mar 2009 - 17:45

Citation :: Rejoins-moi à la salle sur demande demain à l'heure du déjeuner.

C'était le message que Sabé avait confié à un hibou de Poudlard pour le transmettre à Elfie. Jamais auparavant elle n'avait eu à communiquer par hibou avec sa jumelle. Même si elles étaient de maisons différentes, et d'ailleurs Sabé avait eu des remarques des autres Serpentard, surtout la première année, elles n'avaient jamais eu de problèmes pour se voir. Et pourtant, elle avait donné rendez-vous par hibou, et dans la salle sur demande.

Flash-back
Sabé l'avait trouvée la première fois d'une manière incongrue. Dès son arrivée à Poudlard, l'une de ses premières envies avait été de trouver cette fameuse salle, par ambition. Sans le dire à personne, elle avait arpenté les couloirs en pensant avec effort à quelque chose de précis, qu'elle croyait être la formule imparable pour ouvrir la salle sur demande. Mais elle avait passé plusieurs semaines sans y arriver. Frustrée, elle avait décidé de remettre ce plan à plus tard. Un mois après, elle déambulait dans les couloirs, nerveuse. Elle pensait à sa sœur. Leur entrée à Poudlard les avait subitement fait grandir, elles avaient cessé de se mener la vie dure. Mais renouer des liens ne se fait pas si facilement, surtout avec l'orgueil et la pudeur de Sabé. Du coup, elle était embêtée. Leur anniversaire approchait, elles allaient avoir douze ans. Sabé pensait pour la première fois de sa vie à faire quelque chose gentil pour Elfie à cette occasion. Et combiner ça à sa gêne quant à montrer son affection était une source de tracas. C'est dans cet état d'esprit qu'elle errait parmi les étages labyrinthiques de l'école. Et brusquement, son regard fut attiré par une porte, sur sa droite. Elle ne savait pas ce qui la poussait à regarder derrière, mais elle appuya sur la poignée. Et elle entra dans une pièce peu profonde, avec un cours d'eau la traversant. Stupéfaite, Sabé réfléchit longuement sur le pas de la porte, avant de réaliser que ça ne pouvait être que... Oui, ça ne pouvait qu'être la salle sur demande. Excitée, elle entra précipitamment. Le cours d'eau était une prodigieuse démonstration, mais qu'est ce que ça faisait là? Elle pensait pourtant à l'anniversaire de sa sœur. Perplexe, Sabé s'accroupit. Elle cherchait un lien entre son souci et l'eau, quand une toute petite embarcation apparut sur l'onde. Un petit bateau, un bateau de pirates. C'était ça. Les pirates. Elfie adorait les pirates ! Sabé avait bondi de joie. Quelques temps après, elle offrait à sa jumelle un livre d'aventures de pirates.. Bien sûr toute cette histoire était restée dans son jardin secret.
Flash-back

Cet épisode lui effleurait l'esprit quand elle arpentait la pièce. Une pièce claire et grande, semblable à une bibliothèque, envahie de très hautes étagères de livres. C'était un bon reflet de Sabé, en fait. Clarté, ordre et connaissance. C'était parfait pour la calmer, même si elle montrait quelques signes d'anxiété.

Tournant en rond comme un lion en cage (ou plutôt, un serpent), elle patientait dans un silence pesant.

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Mer 25 Mar 2009 - 21:00

Citation :: Rejoins-moi à la salle sur demande demain à l'heure du déjeuner.

C'était le message qu'avait reçu Elfie par hibou, de toute évidence de la part de Sabé. C'était déjà le soir, Elfie était retournée dans la salle commune des Gryffondor après le dîner - dans laquelle elle n'avait pas vu Sabé mais c'était surtout parce qu'elle était trop occupée à lancer du jus de citrouille sur ses camarades. Elle en voulut un peu à sa soeur de la déranger dans un tel moment, même si elle ne devait pas en être consciente. En effet, juste après le repas, la plupart des élèves se mettaient au travail et Elfie ne dérogeait pas à la règle, plus par conscience et par nécessité que par plaisir. Cela dit, le soir, elle était donc plutôt calme et elle travaillait, ce que Sabé aurait apprécié, tiens donc. Le hibou de sa jumelle entra par la fenêtre de la Tour et se percha sur une des lampes qui éclairaient les tables de la salle commune. La jeune fille le regarda un instant, se demandant pourquoi sa soeur lui envoyait un message par hibou au lieu d'être venue la voir à table. Puis elle y lut le message cité précédemment.

Flash-Back

Elfie avait trouvé cette salle par inadvertance en deuxième année, bien que pas mal de gens lui en eurent parlé plus d'une fois. Ca restait légendaire mais ça faisait rêver la jeune Rosebury. Bien sûr ! Attendez, une salle qui, selon les désirs ou les besoins, offrait ce qu'elle pouvait ! Elfie aurait pu y trouver n'importe quoi pour vivre de nouvelles aventures ~~chocolatées~~ encore plus belles et intéressantes ! Seulement, l'école était tellement grande et elle avait tellement d'endroits à explorer qu'elle n'y avait plus songé. Finalement, elle l'avait trouvée alors qu'elle était avec une amie et qu'elles couraient dans les couloirs dans l'espoir d'échapper au concierge auquel elles avaient joué un vilain tour. Elles étaient alors tombé sur un petit placard à balai qu'Elfie ne retrouva plus à cet étage. Elle songea immédiatement à cette histoire de Salle sur Demande et décida d'y retourner. Elle ne la retrouva pas tout de suite mais ayant, un jour, penser si fort à la faim qui la tenaillait, elle trouva une porte qui la mena à Pré-au-Lard. Bien qu'elle aurait dû être couchée depuis quelques heures lorsqu'elle entra dans la salle mais ça ne l'empêcha pas de faire un tour dans le village, malgré les interdictions, et de se payer incognito une Bièraubeurre. Elle tut cet événement à tout le monde parce qu'il lui était interdit d'aller à Pré-au-Lard en dehors des sorties scolaires mais elle le réitera plus d'une fois, la sensation d'être hors-la-loi était beaucoup trop agréable pour être réprimer.

Flash-back

Elfie lut le message avec gravité puis se replongea vite dans son devoir de runes anciennes, sans quoi elle sentait qu'elle était prête à perdre toute sa concentration. Elle boucla rapidement son devoir puis finit par monter se coucher, après s'être chamaillé avec une élève de quatrième année à qui elle tira les cheveux d'un air mauvais.

Le lendemain, à midi, Elfie se rendit au septième étage. Bien sûr, la porte qui menait à la Salle de Va-et-Vient était invisible et Sabé devait déjà être entrée. Elle tourna trois fois en rond devant l'emplacement du mur qu'elle savait être pour la porte et pensa très fort à trouver Sabé, en s'empêchant de penser à manger parce qu'elle n'était pas encore allée déjeuner. La porte apparut petit à petit et Elfie entra. L'imagination de sa soeur n'était pas très fournie, puisqu'elle se trouvait alors dans une pièce immense, très claire et fourmillant de livres jusque très haut sur les étagères. Elfie grimaça en voyant autant de culture générale à laquelle elle n'aspirait vraiment pas. Elle jeta un coup d'oeil à sa soeur, qui tournait en rond, visiblement très nerveuse :

- Bah dis donc, c'est nouveau d'm'envoyer un hibou ? demanda-t-elle d'un air incrédule à Sabé en secouant la tête comme pour signifier qu'elle devenait complètement cinglée.

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Sam 28 Mar 2009 - 11:58

Quand Elfie entra dans la pièce, Sabé ne s'arrêta pas de tourner. Comme si elle était prise dans son anxiété.

"Bah dis donc, c'est nouveau d'm'envoyer un hibou ?"

Elle ne vit pas le visage incrédule de sa jumelle, mais elle le devina au ton de sa voix, qu'elle connaissait par cœur. Maintenant, il fallait répondre. Et dans le bon ordre. Cela, Sabé savait quand même encore le faire, maniaque de l'organisation qu'elle était.

"Elfie."

Ça, c'était autant pour rappeler sa soeur à l'écoute que pour revenir à la réalité.

"Tu vas bien ?"

Elle lui posa la question les yeux rivés sur elle, comme si elle venait de découvrir une énorme pustule sur le visage jumeau qui lui faisait face. Elle avait l'air très sérieux et de moins en moins alerté, comme si la présence d'Elfie ici avait apaisé sa nervosité.

Sans écouter la réponse, elle repartit dans son cercle agité, les mains dans le dos, entrelacées sur sa baguette. Les sourcils froncés, elle cherchait par où commencer.

"Écoute, euh, il faut que tu fasses attention... je.."

Elle marqua un temps, les yeux grands ouverts, comme si la phrase qu'elle cherchait depuis le début venait de s'imprimer dans son esprit.

"Chasse aux sang de bourbe. Les Serpentards font une chasse aux sang de bourbe."

Les mots étaient sortis comme du plomb, lourds et encombrants, pesants de sens, en tout cas pour Sabé. Elle fixait sa soeur, désespérée et nerveuse. Sa paupière droite clignait, tic fréquent chez la jeune fille.

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Sam 28 Mar 2009 - 15:44

"Chasse aux sang de bourbe. Les Serpentards font une chasse aux sang de bourbe."

Elfie était pantoise face à la révélation de sa soeur. Tantôt elle s'apprêtait à répondre à l'aimable question de politesse que Sabé lui avait posée par l'affirmative. Puis Sabé l'avait fixée de telle manière qu'Elfie ne put s'empêcher de porter la main sur son nez, songeant qu'elle avait probablement quelque chose d'innommable sur le visage. Puis vint la déclaration... qui empêcha dès lors la petite Gryffondor de laisser échapper le moindre son de ses lèvres (mis à part un "oh" inaudible). C'était comme si ses cordes vocales avaient été coupées net par un sort irrémédiable. Sabé avait cessé de tourner en rond au milieu de cette immense bibliothèque assombrie par ses propres paroles.

Pendant un instant, il fallut à la jeune Rosebury le temps de récupérer. Ce n'était pas tant l'idée d'une chasse aux Sang-de-Bourbe qui effrayait la Rouge et Or que la sensation que sa soeur était gênée que ça arrive. En quoi ça l'embêtait, elle qui n'avait jamais pu les supporter et qui défendait clairement les idées de pureté de la race ?

Elfie était gênée, elle, par l'idée. Elle qui aimait partir à la découverte, explorer les territoires inconnus, enfreindre les lois, embêter ses camarades, leur tirer les cheveux, déchirer leurs devoirs et qui n'avait jamais eu peur de faire éclater un scandale pour une broutille, elle ne comprenait pas l'intérêt de chasser les Nés-Moldus. Elle trouvait que ça dépassait l'entendement. Jouer, oui, faire souffrir... Elle en était incapable. Etant donné l'air maladif et désemparé de Sabé, Elfie se dit que sa soeur n'avait pas l'air très enthousiasmée par la perspective de martyriser les Nés-Moldus.

- Tu... Tu vas y participer ? demanda-t-elle avec des yeux ronds de stupéfaction, pour vérifier.

Et elle aurait beaucoup aimé entendre un "non" mais venant de Sabé, ça n'aurait jamais sonné très juste. Même si elle avait changée depuis leur enfance, elle n'en restait pas moins persuadée que les Nés-Moldus n'étaient pas moins des sorciers comme les autres. Elle remarqua que le tic nerveux qu'avait sa soeur lors d'un stress (donc assez régulièrement) reprenait. Ca ne lui ressemblait pas. Et c'était probablement le plus déroutant.

Dans un effroyable coup de sang, Elfie sentit son coeur rompre sa poitrine et elle changea du tout au tout (ce qui était, somme toute, assez basique chez elle.) Elle quitta cet état de nervosité et de désarroi pour adopter celui de la protectrice des Âmes en Perdition. Elle se sentait très justicière, prête à sauver la Veuve et l'Orphelin au dépens de sa propre vie. Et comme d'habitude, elle exagérait beaucoup trop les choses. D'un ton théâtral, elle hurla sur sa jumelle :

- TU PEUX PAS FAIRE UNE CHOSE PAREILLE ! C'EST INCONSCIENT ET IMMORAL !

Venant d'Elfie, ça paraissait assez étonnant, dans le sens où elle semblait n'être pas encore assez mature pour être pourvue d'une conscience et d'une morale. Elle avait les deux mais leurs interventions étaient bornées aux cas jugés comme extrêmes (ce qui signifiait qu'Elfie était aussi pourvue d'un sens de jugement). Reprenant un ton calme mais néanmoins perfide - pour convaincre sa soeur de l'absurdité de l'entreprise - la petite Rosebury finit par lâcher :

- En plus, tu risques le renvoi. C'est pas c'que tu veux, pas vrai ? Tu s'rais la honte de la famille... fit-elle encore remarquer en roulant les yeux de son air le plus innocent.

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Dim 29 Mar 2009 - 12:39

Elfie était restée assommée par la déclaration. Muette, déconfite, elle ne répondait rien, ce qui n'aidait Sabé à sortir de sa torpeur. Puis les lèvres de sa jumelle reprirent leur production de son.

"Tu... Tu vas y participer ?"

D'abord incrédule. Sabé, elle, ne répondit pas. En fait, la question la prenait de court, elle n'avait pas pensé parler de ça et elle avait mis tant de concentration sur ce qu'elle allait dire à sa sœur que son cerveau n'était pas capable de réagir aussi vite. De toute façon, Elfie ne lui en laissa pas le temps, elle se mit à hurler.

"TU PEUX PAS FAIRE UNE CHOSE PAREILLE ! C'EST INCONSCIENT ET IMMORAL !"

C'était si loin de ce que la jeune Serpentard avait imaginé de cette scène qu'elle avait l'impression que sa mâchoire se décrochait. Elle, inconsciente ? Tueuse de Sang-de-bourbe ? Mais pourquoi est-ce qu'Elfie lui disait tout cela ? Elle s'emballait, comme d'habitude !

"En plus, tu risques le renvoi. C'est pas c'que tu veux, pas vrai ? Tu s'rais la honte de la famille..."

Et maintenant elle essayait de la soudoyer. Toute la réaction de sa jumelle finit par énerver Sabé. Elle avait mis tant de temps à ruminer ce qu'elle allait dire, c'était si compliqué pour elle, et Elfie lui sortait des bêtises ?! De toute façon elle n'avait jamais rien compris. Pleine de colère et de mal être, Sabé explosa à son tour. Enfin à sa manière, complètement à l'inverse de son impulsive de sœur, d'une voix forte mais basse, presque sèche.

"Mais tu ne comprends rien ! Rien ! Je n'ai jamais dit que j'allais participer, t'es folle, je ne vois pas pourquoi j'irai traquer des Sang-de-bourbes, j'ai des choses plus importantes à faire, je ne suis pas à Poudlard pour maltraiter des moldus !"

Elle ne les aimait pas, ça non, elle les trouvait inférieurs et pas à leur place à Poudlard. Elle se montrait hautement désagréable avec ceux qui avaient le malheur de l'approcher. Mais jamais elle ne perdrait son temps pour étudie, sa place à l'école et la fierté de sa famille pour quelques pauvres moldus sans valeur. La respiration saccadé, le regard noir, elle fixait son idiote de sœur. Sa sœur qui ne comprenait rien à ce qu'elle voulait lui dire. Il faut dire qu'elle osait si peu le dire que ça n'était pas du tout explicite pour le moment.

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Dim 29 Mar 2009 - 23:08

"Mais tu ne comprends rien ! Rien ! Je n'ai jamais dit que j'allais participer, t'es folle, je ne vois pas pourquoi j'irai traquer des Sang-de-bourbes, j'ai des choses plus importantes à faire, je ne suis pas à Poudlard pour maltraiter des moldus !"

Sabé s'était énervée tout de suite après qu'Elfie eut fini sa crise de nerfs, ce qui avait achevé de faire taire la petite Gryffondor. Elle s'était presque recroquevillée sous les éclats de voix, même si sa soeur n'était pas du genre à hurler comme elle-même en était capable. Elle s'était contentée de répliquer d'un ton ferme et un peu menaçant, mais sans trop haussé le ton. Elfie reprit un peu de consistance face à Sabé, bien que son attitude l'impressionnait toujours beaucoup. Elle n'osait plus vraiment rien dire.

L'espace d'un instant, la pensée qu'elle était vraiment idiote lui traversa l'esprit. Elle ne comprenait jamais rien à comment il fallait réagir. Elle aurait donné cher pour partir sur le champ et laisser Sabé à ses états d'âme. Finalement, elle finit par dire :

- Et alors quoi ?

C'avait été dit sur un ton un peu revêche et dédaigneux, histoire de faire croire à Sabé que non, elle ne perdait pas la face devant elle. Le "tu ne comprends rien" très insistant de sa soeur quelques secondes plus tôt l'avait un peu meurtrie. Elle jouait les indifférentes. Au final, elle se disait qu'elle aurait dû répondre sur un ton un peu moins méchant, parce que sa Serpentard de soeur semblait perturbée par ce qu'elle comptait lui dire. Sauf qu'après un semblant d'insulte, elle ne méritait plus autant de commisération de la part d'Elfie. Qui demanda encore :

- C'est quoi, le problème ? en reprenant inconsciemment sa parfaite panoplie de l'incrédulité idiote (bouche ouverte, regard perplexe et sourcils levés)

Sujet: Re: Rendez-vous nulle part [Terminé] Mar 31 Mar 2009 - 10:37

Sabé s’était mise en colère. Elle s’étonnait elle-même d’être sortie de ses gonds sans le vouloir, surtout pour quelque chose qu’elle n’avait pas encore expliqué. Son éclat de voix était dû à sa nervosité, et ses nerfs allaient encore subir une épreuve, car après cela elle ne pouvait pas reculer comme si de rien n’était.

« Et alors quoi ? » demanda sa jumelle d’un ton sec.

La Serpentard savait qu’elle l’avait vexée, elle avait été un peu dure. Plus elle grandissait, plus elle avait du mal à assumer le mépris qu’elle pouvait ressentir parfois contre sa sœur. Elle était exaspérante, mais Sabé ne pouvait plus supporter de la blesser. C’était ça, d’aimer sa sœur. Elle se calma un peu, embêtée intérieurement d’avoir crié sur Elfie, qui se montrait froide pour cacher –en vain- sa blessure.

« C’est quoi le problème ? » insista-t-elle, avec sa figure habituelle de l’étonnée caricaturée.

Sabé se sentait maintenant honteuse. Elle avait fait tout ce cinéma pour rien, elle s’était énervée, alors que.. Oui, quel était le problème ? Elle n’arrivait plus à le formuler tant il lui paraissait idiot à présent. Et même, aussi important pouvait-il être pour elle, elle redoutait la réaction de sa sœur.

« Et bien.. » commença-t-elle, le regard fuyant.

« Ils attaquent un peu au hasard, enfin tu sais comment ils sont, ils ne savent pas toujours qui est un Sang-de-bourbe et ça s’étend presque à tous les autres élèves qui ne sont pas Serpentards.. »

C’était un peu confus, mais au moins elle avait retrouvé sa voix habituelle, plane et grave. Par contre, la suite restait bloquée dans sa gorge. Ou dans le nœud de son ventre.

Le visage de Sabé semblait s'être complètement décomposé lorsqu'Elfie lui avait demandé quel était le problème avec cette chasse aux Sang-de-Bourbe. D'accord, les Serpentards chassaient les Nés-Moldus mais encore ? Les soeurs Rosebury étaient à Poudlard depuis trois ans déjà et tout le monde savait bien qu'elles étaient issues d'une noble lignée de sang pur et qu'il n'y avait donc pas lieu de les attaquer puisqu'elles n'avaient pas de sang impur qui coulait dans les veines. Elles n'étaient pas très connue dans l'école. Cela dit Sabé était chez les Serpentards et ça suffisait à éliminer les risques d'attaque.

« Et bien... » avait-elle commencé en cherchant à fuir le regard de la petite Elfie.

Le fait qu'elle soit plus petite en taille - ne serait-ce que de quelques centimètres - embêtait beaucoup la Gryffondor, dans la mesure où elle se sentait déjà très inférieure à sa jumelle. Elle tenta de ne pas en prendre compte mais c'était déjà suffisamment difficile comme cela.

« Ils attaquent un peu au hasard, enfin tu sais comment ils sont, ils ne savent pas toujours qui est un Sang-de-bourbe et ça s’étend presque à tous les autres élèves qui ne sont pas Serpentards... » ajouta Sabé et Elfie crut y voir une once d'intérêt pour sa sécurité.

Elle n'avait pas peur des attaques des Serpentards. La petite Rouge et Or vivait dans un monde à part, bien à elle, et elle ne se préoccupait que très rarement de ce qui se passait autour d'elle - juste quand elle avait intérêt, à vrai dire. Ce n'était pas le cas ici. Elle était de Sang Pur et tout le monde savait ça. Les Serpentards à qui il ne fallait pas s'en prendre et les frasques inconscientes et irréfléchies d'Elfie, même si elles ne l'avaient pas rendue aussi célèbre que les jumeaux Weasley des années plus tôt, la faisaient connaître un peu dans l'école. On savait tous bien ici qu'elle ne fréquentait pas de Sang-de-Bourbe et qu'elle n'en était pas une.

- Où tu veux en venir à la fin ? demanda Elfie avec une impatience méprisante et non dissimulée.

Voir sa soeur aussi nerveuse la rendait elle-même nerveuse et elle voulait connaître le fin mot de toute cette histoire, pour ensuite retourner à des occupations plus distrayantes.

« Où tu veux en venir à la fin ? » Elfie posa la question avec un mépris peu habituel chez elle. Le manège de Sabé avait l’air de la gonfler.

Et en plus elle ne comprenait pas, elle la forçait à tout dire de façon claire, alors qu'elle aurait préféré être comprise plus vite. La Serpentard s’en sentait encore plus mal. Elle se mettait déjà la pression seule, à se dire que ce qu’elle voulait dire était ridicule, mais si en plus sa jumelle trouvait d’office cela chiant... Merci bien, elle s’était inquiétée pour elle, elle se montrait sentimentale juste pour elle et elle avait l’air de s’en moquer comme d’un cours –n’importe lequel, vu la motivation scolaire d’Elfie-.

Blessé, en colère et vexée d’être blessée –orgueil, quand tu nous tiens-, elle fit un regard noir à la Gryffondor. Elle ne cessait de se dire qu’elle ne méritait pas son inquiétude, mais c’était évidemment la colère qui parlait, bien que maintenant elle avait nettement moins peur pour elle.

« Puisque tu ne percutes pas, je vais te le dire.. » débuta-t-elle avec un soupir. C’était autant pour signifier à Elfie qu’elle avait la réflexion lente que pour se préparer à se lancer.

« Je te dis tout ça parce que.. j’ai eu peur pour toi. » Elle n’avait pas trop laissé traîner son hésitation, pour tenter de cacher sa gêne à lui avouer son inquiétude.

« Ils sont un peu excessifs, et puis je sais que tu serais du genre à défendre comme une idiote un sang-de-bourbe, alors j’ai eu peur que tu sois attaquée. »

Une petite remarque sur la personnalité je-sauve-la-veuve-et-l’orphelin d’Elfie comme pour dissimuler le reste de ses propos. Mal à l’aise, elle regardait le sol fréquemment, même en voulant garder la tête haute, mais néanmoins elle se sentait soulagée d’avoir lâché le morceau. Ça lui pesait trop.

« Puisque tu ne percutes pas, je vais te le dire... Je te dis tout ça parce que.. j’ai eu peur pour toi. Ils sont un peu excessifs, et puis je sais que tu serais du genre à défendre comme une idiote un sang-de-bourbe, alors j’ai eu peur que tu sois attaquée.

Elfie avait du mal à saisir le discours de Sabé. Ca paraissait tellement inintelligible dans sa bouche d'entendre tout ça... "J'ai eu peur pour toi" Ca, par exemple, ça ne voulait pas dire grand-chose. La petite Gryffondor était partagée entre le désir de serrer sa soeur dans ses bras -émotion de la déclaration oblige-, celui de la gifler parce qu'elle n'avait pas besoin de sa pitié et celui d'éclater de rire parce que c'était tellement improbable de l'entendre parler de cette manière que ça en devenait risible.

Elfie se mit à rire à gorge déployée sous l'effet des paroles de sa jumelle. Un rire qu'elle n'avait pas pu retenir mais qui se révélait aussi très cruel, ce qu'elle avait du mal à empêcher.

- Tu t'fiches de moi ? fit-elle à la Serpentarde, après s'être un peu remise de ses émotions.

Elle tenta de reprendre un peu son sérieux mais le visage de Sabé lui apparaissait ainsi si ridicule qu'elle avait vraiment beaucoup de mal. Finalement, après s'être dit qu'il ne valait mieux pas l'énerver (quel effort ç'avait dû être pour Sabé que de lui avouer tout ça !), elle finit par reprendre une certaine contenance et fit face, sérieuse et grave, à sa jumelle.

- T'as pas à t'inquiéter pour moi, lui dit-elle.

La suite était très confuse et Elfie hésitait entre plusieurs versions. Devait-elle encore se moquer d'elle ou bien lui rendre la pareille, la rassurer et lui dire qu'elle aussi ne devait pas se laisser entraîner dans ces chasses dépourvues de sens ?

Sabé avait beaucoup craint la réaction de sa jumelle mais celle-ci lui fut bien plus douloureuse qu’elle n’avait imaginé. Elfie avait ri. Elle avait ri sans retenue.

« Tu t’fiches de moi ? »

Elle aurait ô combien préféré faire une blague. Mais là il était trop tard pour se mettre à rire et déclarer « Mais oui, bien sûr, tu ne crois quand même pas que je m’inquiétais réellement pour toi ? ». Elle aurait préféré. Mais plus possible, vu son cœur serré, sa bouche sèche et tous ses traits crispés. Elfie avait dû se rendre compte que ce n’était pas un sujet risible, car elle reprit une attitude plus sérieuse par la suite. Mais pour Sabé, c’était trop tard, le mal était fait.

« T’as pas à t’inquiéter pour moi. » reprit sa jumelle.

Effectivement, sur le moment il n’y avait plus aucune inquiétude, seulement de la rancœur. Sabé se sentait démolie. Mais par orgueil, elle ravala ses larmes et respira lentement par le nez, pour détendre son visage. Tout garder, tout contenir. Elle reprit peu à peu un air suffisant et distant, qu’elle avait habituellement, mais qui prouvait bien encore qu’elle n’était pas contente.

« Si tu le dis. Je te vois mal faire face à une bande de Serpentard, mais c’est comme tu veux. »

Elle lui rappelait implicitement que Serpentard était la meilleure maison (pour Sabé en tout cas) et qu’Elfie n’était pas assez bonne pour se défendre. Tout cela juste pour lui faire sentir qu’elle avait très mal pris sa réaction. Si elle refusait l’inquiétude de sa sœur, elle n’aurait rien d’autre que du mépris. C’était typique de la jeune fille. Froide, elle toisait la Gryffondor en se maudissant intérieurement d’avoir voulu la protéger.

« Si tu le dis. Je te vois mal faire face à une bande de Serpentard, mais c’est comme tu veux. »

Elfie n'était pas tellement outrée par le propos. Elle avait l'habitude des allusions désobligeantes de la part de sa soeur quant à son manque de maîtrise, son incompétence ainsi que celle de la maison des Gryffondor. En effet, il n'était pas rare d'entendre des commentaires - souvent très sous-entendus - de Sabé vanter les mérites de Serpentard et rabaisser ceux de Gryffondor. Elfie s'en moquait : elle savait ce qu'elle valait. Et les Serpentards ne lui faisaient pas peur. Comme elle avait décidé de ne pas perdre son calme devant sa soeur, elle préféra lui faire face avec une sorte de majesté grandiose et beaucoup de mépris :

- C'pas pasque tu m'vois pas leur faire face qu'je saurais pas faire.

Hors de question qu'elle la laisse parler ainsi. Elle avait vexée Sabé en riant mais elle n'avait pas pu s'en empêcher et puis, elle l'avait vraiment mérité. Elle n'en finissait pas d'arborer son arrogance et son sentiment de supériorité, constamment, et ça insupportait Elfie, qui détestait être prise pour une imbécile. Gardant le silence pendant un moment, elle regarda sa soeur avec une méchanceté affichée. Qu'elle s'inquiète pour elle, peuh. Elfie s'en moquait complètement. Elle n'avait besoin ni de sa pitié ni de son aide.

- J'suis pas aussi idiote qu'tu veux bien l'croire, finit par ajouter la petite Rouge et Or, en perdant un peu de sa superbe, parce qu'elle essayait de se convaincre elle-même de ce qu'elle disait.

Elle avait conscience qu'elle n'était pas très maligne. Mais elle avait quand même des qualités certaines, surtout en magie. Elle n'allait pas se laisser faire par une bande de guignols tout verts sans cervelle. Elle avait d'ailleurs bien d'autres choses plus intéressantes auxquelles songer, telles que ce passage secret derrière la salle commune des Serdaigles ou le réaménagement de son nouveau refuge, qu'elle avait installé dans une vieille salle de classe inutilisée, au dernier étage d'une des tours du château.

Alors que Sabé avait repris son masque méprisant des mauvais jours, Elfie prit à sa façon le même air pour répliquer.

« C'pas pasque tu m'vois pas leur faire face qu'je saurais pas faire. »

Après un silence partagé, la jumelle ajouta, pour montrer qu’elle aussi pouvait être méchante :

« J'suis pas aussi idiote qu'tu veux bien l'croire »

Mais Sabé n’y croyait pas. Oh, au fond d’elle, elle savait qu’Elfie était une sorcière douée. Elles étaient de la même famille après tout, il lui manquait juste de la concentration. Ce qu’elle ne croyait pas, c’était l’air abject qu’elle prenait. Ça n’était pas elle et ça n’était pas crédible. Néanmoins cela eut le mérite de détendre un peu la Serpentard. Elle savait qu’elle n’était pas la seule à avoir été blessée, elles étaient plus ou moins à armes égales. L’orgueil de Sabé en avait pris un sacré coup, mais elle se sentait maintenant capable de passer outre. Tant pis, elle ne retenterait jamais de s’ouvrir à sa sœur. Qu’elle aille se frotter aux autres, au pire elle se retrouvera humiliée. Ce ne serait pas la première fois qu’Elfie fasse honte à sa famille, et puis cela donnera encore le beau rôle à sa jumelle. C’est avec ses pensées réconfortantes que Sabé put esquisser un sourire sur son visage froid, coutumier.

« Bien. Si tu le dis. J’espère que tu n’auras pas à le vérifier. »

Si, en fait elle l’espérait assez. Porter dans la revanche sournoise lui permettait d’oublier sa propre humiliation. Elle était encore agacée de ne pas avoir été prise au sérieux, mais cette fois plus question d’avouer quoique ce soit. Elle haussa les épaules pour signifier à Elfie qu’elle se moquait bien de son sort à présent.

Bien. Si tu le dis. J’espère que tu n’auras pas à le vérifier, avait répliqué Sabé avec toujours ce ton froid et impassible qu'elle ne quittait pas.

La Gryffondor mourait d'envie de gifler sa soeur, juste pour lui faire fermer son clapet mais elle se disait qu'elle avait finalement d'autres chats à fouetter et que, par ailleurs, elle n'aurait jamais le dernier mot avec cette fille têtue et plus maligne qu'elle. Parfois, elle avait juste envie de ne pas être née ou bien que Sabé ne soit qu'une Rosebury parmi tant de Rosebury et non sa soeur, sa jumelle, la chair de sa chair et le sang de son sang avec qui elle partageait les mêmes empreintes, la même histoire, la même famille mais pas les mêmes sentiments ni la même vision des choses.

Sabé lui en voulait énormement de s'être moquée d'elle et d'avoir tant heurté son amour-propore mais Elfie était incapable d'agir autrement. C'était si étonnant de la part de Sabé de se montrer affectueuse ou inquiète pour quelqu'un d'autre qu'elle. A présent, elle se comportait comme à l'accoutumée : comme si rien ni personne n'était capable de l'atteindre alors qu'au fond, Elfie en était sûre, la Serpentarde était meurtrie à l'intérieur. Elle voulait encore prendre un peu de plaisir à piétiner le coeur saignant de sa soeur.

- Tu s'rais surtout vexée qu'j'te prouve qu't'as tord ! Tsss..., répondit Elfie en levant les yeux au ciel comme pour dire à Sabé qu'elle était ridicule de réagir comme elle le faisait.

Elfie aussi était très ridicule et très enfantine mais, si elle s'en doutait un peu, elle ne faisait pas franchement d'efforts pour changer tout cela. Son "tsss" très méprisant avait pour but de vexer encore plus la Vert et Argent et de la mettre hors d'elle. Elle était pratiquement sûre, ceci dit, que cette dernière ferait tout pour ne rien en laisser paraître mais ça faisait tout l'intérêt de l'humiliation : la voir s'enfoncer et se noyer dans son propre orgueil. Elle était parfois tellement hautaine qu'elle allait bien finir par tomber de sa hauteur et par se faire une bonne entorse...

Ce qui énervait la petite Rouge et Or, ce n'était pas tant le fait que sa soeur se préoccupe de son sort. En fait, elle était même très touchée par cette petite attention. C'était le fait qu'elle montre autant de mépris à sa maison, comme si Serpentard était l'élite de Poudlard, et aussi le fait qu'elle présente Elfie comme complètement incapable de se gérer et de faire face à une situation de façon mature. Est-ce qu'elle ne pouvait pas se montrer agréable de temps en temps ? Est-ce qu'elle était toujours obligée d'avoir l'air d'avaler une couleuvre quand elle faisait des efforts ? Evidemment, face à tant de questionnements sans réponses, elle oubliait de songer au fait qu'elle non plus ne faisait pas d'efforts pour faciliter les choses à sa soeur.

« Tu s'rais surtout vexée qu'j'te prouve qu't'as tord ! Tsss.. » répliqua la Gryffondor, levant les yeux au ciel.

Sabé était partagée face à cette réponse. Elle n’aimait pas que sa sœur la défie, juste pour la contrarier. Et puis sa façon de raccourcir les mots était agaçante aussi. Mais tout ça, c’était quelque chose de familier pour la Rosebury. Depuis de nombreuses années, certainement depuis leur naissance, elles se cherchaient l’une l’autre. Au final, elle ne savait pas si cette réaction l’amusa ou l’exaspérait. Elfie ne changeait pas, alors qu’elle avait amorcé un tournant dans leur relation. Tant pis, ça la confortait dans son idée –sincère- qu’elle était en avance sur sa jumelle. Elle ne voulait plus se mettre en colère, c’était très désagréable et fatigant. Elle irait verser quelques larmes en cachette plus tard, pour le moment elle se contenta de sourire en coin, l’air diabolique malgré elle.

« Libre à toi de rêver. »

Impossible de ne plus la rabaisser, c’était sa manière principale de s’adresser à Elfie, même dans leurs bonnes périodes où elles ne faisaient que se chamailler « gentiment ». C’était même fait sans réel mépris derrière parfois, c’était simplement l’orgueil de Sabé. Sans se retourner, elle prit un livre sur l’une des étagères de la salle sur demande. C’était un livre sur les potions, déjà lu plusieurs fois, que la Serpentard avait parcouru en attendant sa jumelle, plus tôt. Le stress l’avait empêché de lire, mais à présent la lecture de son sujet favori lui ferait le plus grand bien.

« Si tu n’as rien d’autre à ajouter, je ne te retiens pas. » lança-t-elle à Elfie, les sourcils haussés, le livre dans ses bras.

- Libre à toi de rêver.

Qu'est-ce que c'était que cet air diabolique ? Le temps d'une fraction de seconde, Elfie imagina le Diable s'emparer de Sabé, son sourire se décomposer en une large grimace mesquine, ses yeux rougir, ses cheveux se dresser sur le haut de sa tête comme les serpents d'une Gorgone... Elle secoua vivement la tête pour se débarrasser de cette pénible image. Fallait vraiment qu'elle arrête de lire des bandes dessinées...

- Si tu n’as rien d’autre à ajouter, je ne te retiens pas.

Elfie prit sur elle de ne rien répondre à Sabé. Parce qu'elle allait être méchante encore et qu'elle n'avait pas envie d'en rajouter une couche. Leurs rapports étaient déjà suffisamment tendus comme ça. En plus, Sabé semblait s'être calmée et l'énerver vaudrait à la jeune Rosebury une immense perte de temps. Elle voulut quand même ajouter quelque chose. Genre "merci de t'être inquiétée pour moi" ou "prends bien soin de toi aussi" mais à dire vrai, sa soeur l'avait quand même beaucoup énervée. La façon qu'elle aurait de le dire n'aurait franchement pas l'air sincère. En réfléchissant bien, Elfie savait que tout ce qu'elle pourrait faire énerverait Sabé. La Gryffondor regarda autour d'elle un moment, contempla les immenses étagères regorgeant de livres et son oeil fut attiré par un rayon particulièrement coloré. S'approchant, elle vit titré sur la reliure d'un livre : "Super-Witch et le Pirate des Ténèbres". C'était sa bande dessinée préférée : des sorciers et des pirates !

- Est-ce que j'ai l'droit d'rester quand même ? demanda-t-elle à Sabé en agitant son magazine pour lui signifier qu'elle allait lire et non l'embêter encore.

[HJ : Désolée si je t'ai faite attendre mais j'avais soit pas d'inspiration, soit pas de temps, soit une fiche à terminer pour un autre forum ! >.< Bwaaah, que je suis débordée !]

Après sa phrase de conclusion, Sabé pensait être tranquille. Elfie allait faire demi-tour théâtralement et passer la porte, laissant la Serpentard dans sa salle sur demande à son effigie, pour se détendre et oublier cette horrible discussion. Enfin, elle n’oubliait jamais les humiliations de ce genre, elle garderait en elle chaque détail, des fois que ça serve pour alimenter une revanche, ou simplement se souvenir de ne pas trop s’ouvrir à sa jumelle. Mais au moins elle oublierait la douleur et sa fierté piquée au vif, pour ne garder que de froides images. Oui, elle avait hâte de se poser ici et de n’entendre rien que le silence, avant de se plonger dans son livre. Mais, euh, pourquoi n’était-elle pas déjà en train de le faire ? Sortant de ses pensées, Sabé vit bien qu’Elfie était toujours là, à flâner devant une étagère. La Serpentard leva un sourcil impatient, et perplexe, quand la jumelle prit un livre de la bibliothèque.

« Est-ce que j'ai l'droit d'rester quand même ? » demanda-t-elle en agitant son truc coloré.

Plusieurs questions se bousculèrent dans la tête de Sabé, mais celle-ci resta impassible comme à son habitude. Petit un, c’était quoi ça, une bande dessinée ? Dans sa salle sur demande ? Petit deux, comment un livre attrayant pour Elfie pouvait se trouver dans SA salle sur demande ? Son entrée ici aurait-elle modifié quelques éléments ? Petit trois, comment ça elle voulait RESTER ? Se sentant légèrement irrité, la jeune fille soupira et chercha ce qu’elle allait répondre. Comment se détendre si Elfie restait là ? En même temps, sa sœur n’avait montré aucun mépris en posant la question, aucune jubilation à embêter sa sœur. C’est presque si elle ne se faisait pas plus petite pour signifier qu’elle ne la dérangerait pas. Et puis, même si elle ne se l’avouerait pas, cette demande innocente ramenait en Sabé des sentiments pour son double.

« Bon. Euh. Si tu veux. » fit-elle, un peu agacée, se détournant d’Elfie avec un geste de la main comme pour la chasser loin d’elle.

Son livre serré contre sa poitrine à peine naissante, elle fit quelques pas pour s’asseoir dans un fauteuil, en tailleur, et fixer son regard dans les potions pour essayer de se détendre.

Sabé avait accepté qu'Elfie reste, sûrement parce que c'était gentiment demandé. Oui, pour une fois, la petite Rouge et Or n'avait pas fait trop de chichis pour obtenir son souhait. Dans d'autres circonstances, elle aurait user de mille et uns stratagèmes plus ou moins variés - des battements de cils à la voix mielleuse en passant par le petit coup de baguette magique - juste histoire d'obtenir une faveur. (Elfie en arrivait là parfois pour un rien.) En même temps, il aurait suffi à son double de refuser et la Gryffondor se serait éclipsée aussitôt avec son livre dans la main.

Elfie entreprit de lire assise par-terre, comme elle avait l'habitude de le faire, n'ayant pas en tête qu'il lui était possible d'employer un fauteuil, comme le faisait sa soeur. C'était d'ailleurs plus confortable. Dans l'esprit de la petite Rosebury, une chaise, ce n'était pas nécessaire. Elle se sentait plus libre assise à même le sol. Enfin bref.

Elle lut ainsi pendant un long moment, passionnée par les aventures de la petite sorcière. Puis, l'ennui et l'absence de mouvement la gagnant - eh oui, la lecture, c'était pas trop son truc - elle finit par se lever et par ranger le livre. Elle avait fait un effort pour ne serait-ce que penser au rangement. Elle était quand même dans la salle de sa soeur, pas question de l'irriter de nouveau en mettant tout sens dessus dessous. En fait, Elfie supposait que, si elle avait été avec n'importe qui d'autre, elle aurait tout fait pour l'agacer toujours plus. S'agissant de son entêtée et orgueilleuse jumelle, elle se faisait toute petite. C'est pourquoi, plutôt que de lui lancer une pique monstrueuse et très désagréable au visage avant de filer dard-dard, la jeune fille préféra s'approcher discrètement de Sabé.

Elle resta un petit moment à la regarder lire - même si elle ne devait plus vraiment lire, dérangée dans sa lecture par la présence troublante de sa soeur - puis lui demanda, très gentiment, les mains dans son dos (ce qui faisait partie de son attirail de séduction mais Elfie s'en servait même inconsciemment) :

- Ce serait cool si on apprenait à faire une potion toutes les deux. Non ?

Elle voulait enterrer la hache de guerre. Elle n'avait pas envie de voir leurs relations dégénérer de jour en jour alors qu'elles avaient enfin réussi à se voir en peinture après tant d'années de dénigrement. Bon, Elfie restait une élève moyenne en potions, elle préférait les sortilèges mais c'était une façon de lui dire qu'elle avait envie de s'intéresser à elle et à ce qu'elle aimait. Là, Elfie s'attendait à un ferme et austère "non" balancé en plein dans la figure. Ca ne coûtait rien d'essayer.

Sabé se sentit mieux peu à peu. Sa sœur se tenait tranquille pour une fois, et elle se plongeait dans ce livre qui traitait de sa passion. Elle ne connaissait rien de mieux que les potions pour la détendre et la faire rêver. Depuis son plus jeune âge c’était vraiment sa matière favorite. C’était un art délicat, car chaque ingrédient avait ses propriétés et ses pièges, il n’y avait pas de droit à l’erreur. Et puis c’était créatif. Partager cette potion avec son oncle Balthazard était également une fierté, Sabé avait l’impression de poursuivre la lignée de sa famille. Et cette pensée était très douce à son esprit, très rassurante. Elle put enfin ignorer la présence de sa jumelle pour savourer sa lecture. Mais cela fut de courte durée. Évidemment Elfie se releva. Sabé l’entendit ranger le livre, en se disant qu’elle n’en avait certainement pas fini la lecture. Elle tenta vainement de faire comme si elle n’existait pas, mais la Gryffondor s’approcha de son fauteuil, pour l’observer. Sabé leva vers elle ses yeux bleus et interrogateurs. Elfie avait sa pose habituelle de demande, les mains dans le dos, la mine discrète. La Serpentard apprécia néanmoins qu’elle ne la cherche pas. Cela voulait dire qu’elle avait compris qu’elle avait mal réagi.

« Ce serait cool si on apprenait à faire une potion toutes les deux. Non ? »

Sabé marqua un temps, de réelle incrédulité. Elle n’avait pas la mimique clownesque d’Elfie dans ces moments là, juste les sourcils haussés et le regard fixe. Elle ne s’attendait pas à ça. Sa jumelle essayait de se racheter là, non ? Une petite voix souffla à Sabé de se méfier, mais c’était plutôt son genre à elle de faire une mauvaise blague déguisée en cadeau. Et puis après ce qu’il venait de se passer, il était surprenant qu’Elfie fasse un pas vers sa sœur, mais il serait bien plus improbable qu’elle essaie de l’enfoncer. Au-delà de ces questions, la proposition toucha la Serpentard. Elfie savait à quel point elle aimait les potions. Bon, elle préférait largement les faire seule qu’avec sa maladroite de jumelle, mais l’invitation était vraiment significative. Sabé ferma son livre, puis se gratta le nez, ne sachant pas quoi faire. N’était-ce pas trop facile ? Ne serait-ce pas une faiblesse que de montrer son émotion, sa joie ? Elfie le méritait-elle ? La jeune fille se leva du fauteuil, son ouvrage à la main.

« Et bien, hm, oui… »

C’était sorti tout seul, sans qu’elle s’en rende compte, tant il lui était impossible de dire non aux potions. Mais elle se rattrapa, dévisageant sa jumelle avec nervosité.

« Mais… Une autre fois. »

Voilà. C’était sa façon de se sortir de là, de garder la tête haute, d’avoir le dernier mot, de celle qui refuse. Elle n’était pas très satisfaite de sa parade, mais c’est tout ce qu’elle avait. Elle était déstabilisée et était plutôt du genre à mûrir lentement ses vengeances.

Sabé était plongée dans son livre et Elfie l'en avait tirée cruellement, comme si elle l'avait sortie avec force et blessures d'un rêve d'une extrême douceur et d'une sérénité inestimable. C'était un livre, enfin quoi ! Comme d'habitude, la petite Gryffondor avait l'impression de déranger Sabé. De toute évidence, elle ne devait jamais avoir été autre chose qu'une sorte de boulet pour sa soeur. Dans son innocent manque de considération envers tout ce qui l'entourait - et qui pouvait entraver son avancée sur le chemin de l'aventure - Elfie s'en moquait. Elle continuait de regarder sa soeur avec ce même sourire un peu béat et impatient, tout le temps que Sabé consentit à lui donner une réponse. Elle semblait incrédule, son expression dans ces moments-là étant légèrement différente qu'à l'ordinaire mais après quatorze ans passés à vivre ensemble, Elfie connaissait même inconsciemment toutes les nuances d'expression de son double. La Serpentarde, après un grattement de nez signifiant qu'elle hésitait, se leva et finit par répondre :

« Et bien, hm, oui… »

Elfie savait bien qu'elle aurait eu du mal à refuser une telle offre. C'était comme proposer à la Rouge et Or d'adhérer un groupuscule de pirates. Ca ne se déclinait pas.

« Mais… Une autre fois. » précisa quand même Sabé, histoire de rester fière face à l'adversité que représentait Elfie.

Bien entendu, Elfie s'attendait à ce genre de réponses. De toute façon, il était déjà une heure moins le quart et elle avait cours sous peu. Même si cette idée ne l'enchantait pas plus que ça, les cours de Botanique avec les Poufsouffles étaient très amusants et puis, elle n'avait pas l'intention de s'atteler à la réalisation d'une potion tout de suite. Elle ne perdit pas le calme acquis après une reposante séance de lecture et, dans un sourire malicieux, répondit :

« Ah mais évidemment. Une autre fois. »

Jouer les mystérieuses plaisait beaucoup à la jeune fille, même si elle était loin de l'être et que la moindre de ses intentions pouvait se deviner comme le nez au milieu de la figure. Cependant, elle prit un soin tout particulier à marquer sa sortie. Juste pour sa satisfaction personnelle. Elle s'eclipsa donc tout doucement de la salle sur demande en faisant un bref signe de la main à sa soeur - un genre d'au revoir très discret et puis, un peu surjoué mais ça, c'était elle tout craché.

» vous venez d'ou?